lundi 11 novembre 2013

Le 11 novembre : ne jamais oublier !

Je suis né et j'ai grandi à Ottawa, quelques kilomètres à l'ouest du Parlement canadien. Presque à distance de marche. Une bonne marche, mais tout de même... Ce que cela signifie, c'est que pour nous, du quartier St-François d'Assise de la capitale, les grandes cérémonies fédérales, pan-canadiennes, avaient une allure d'activité locale. Nous étions là. Et l'une des activités à laquelle j'ai eu l'occasion d'assister à différentes reprises, c'était bien sûr la cérémonie du Jour du Souvenir. Le 11 novembre.

Les images s'enchevêtrent depuis cette fin de matinée de novembre, sans doute dans les années 1950, où j'ai vu pour la première fois défiler des anciens combattants avec leurs médailles et leurs uniformes, et le dépôt des gerbes de fleurs au Cénotaphe, à quelques pas des édifices du Parlement. À cette époque, les anciens soldats de la Deuxième Guerre mondiale avaient à peine 30 ans. Ils étaient encore tout jeunes. Ceux de la Première Guerre mondiale arrivaient à peine à l'âge de la retraite, la mi-soixantaine. Il y avait encore, bien vivants, des vétérans de l'infâme guerre des Boers...




Aujourd'hui, il ne reste que quelques milliers de survivants des combats de la Guerre 39-45, approchant ou dépassant l'âge de 90 ans... Dans une dizaine ou une vingtaine d'années, ils seront disparus, et avec eux les mémoires vivantes du plus important conflit mondial de l'histoire humaine. Une des seules guerres justes de l'humanité. Le combat de la civilisation contre le nazisme d'Adolf Hitler. Le Jour du Souvenir ne sera plus jamais le même quand le dernier de ces valeureux combattants nous aura quitté.

Après plus de 40 ans en journalisme, on développe une carapace et une capacité de cynisme hors du commun. Mais je reste ému comme quand j'étais enfant à la vue de ceux (et parfois celles) qui ont risqué leur vie dans les zones de combat... en France, en Belgique, en Hollande, en Allemagne, en Italie, en Europe de l'Est, en Russie, en Afrique du Nord... et dans le Pacifique. Ils ont vu des horreurs qui ne les ont jamais quittées. Certains hésitent toujours à en parler. Ils sont moins nombreux à défiler, ce 11 novembre, mais je les salue toujours.

Ce qui m'inquiète, c'est que le souvenir de leurs exploits s'amenuise et finisse par n'être que quelques chapitres dans des livres d'histoire que les générations futures n'ouvriront à peu près pas. Il ne s'agit surtout pas de glorifier la guerre ou le militarisme, loin de là, mais ces anciens soldats ont fait un sale boulot pour que nous puissions vivre en paix. Qu'ils aient réussi ou pas à notre satisfaction ne diminue en rien la valeur de leur geste. Des milliers et des milliers y sont morts, et ces derniers survivants au pas quelquefois hésitant et aux yeux vaillants incarnent le courage de leurs compatriotes tombés au combat. 


                   Le monument « Les braves » à la plage Omaha

Cet automne, j'ai eu la chance, pour la première fois dans ma vie, de visiter les plages du débarquement, en Normandie, ainsi que les cimetières canadien et américain à proximité des plages où débuta l'assaut final contre les armées d'Hitler. J'ai aussi, avec mon épouse, visité des musées à la mémoire de la campagne de Normandie et vu les trous de balles et d'obus qui marquent toujours les murs d'édifices des centres-villes, comme au Palais de justice de Rouen.

C'était plus qu'une leçon d'histoire. C'était ressentir, sur place, des émotions qu'on ne peut que deviner en scrutant le regard chargé des anciens combattants. Marcher dans le sable des plages Omaha et Juno, regarder la mer devant, puis faire demi-tour et voir les obstacles naturels, auxquels s'ajoutaient les fortifications allemandes, que devaient franchir sous le feu de jeunes hommes qui, souvent, n'avaient même pas 20 ans. Sur Omaha Beach, de la première vague de soldats américains, 90% ont été tués ou blessés avant de traverser la plage...



Se promener dans le cimetière canadien et voir les noms et les âges sur les tombes de quelque 4 000 jeunes hommes et quelques femmes... Répéter l'exercice dans l'immense cimetière américain, où ils sont plus de 10 000... On ne peut rester insensible en pensant que le soldat Gignac d'à peine 19 ans, d'âge scolaire, aurait pu mener une vie longue et heureuse, se marier, avoir des enfants et des petits-enfants... et peut-être encore faire partie de ce défilé du 11 novembre avec les derniers survivants. Mais il a été fauché à la sortie de l'adolescence, à des milliers de km de sa famille et de son patelin, sur les plages ou dans la campagne normande... Il ne faut jamais oublier ça!



Quand les derniers anciens combattants de la guerre 39-45 seront disparus, il y aura encore ces plages de France près de Ste-Mère Église, près d'Arromanches, près de Courseulles-sur-Mer, et cet imposant cimetière canadien près du village de Reviers, où le souvenir des événements d'il y a 70 ans et des gens qui y ont participé ou en ont été témoins reste puissant. Qu'on y organise des voyages scolaires, des visites à tous âges, pour qu'on n'oublie jamais le sens du 11 novembre.

Pour avoir un jour la paix, la vraie, il faudra tous les ans un Jour du Souvenir. De fait, il en faudrait 365...

1 commentaire:

  1. Merci, Pierre. À 21 ans, j'ai eu l'occasion de me promener sur ces mêmes plages que tu as parcourues cet été. J'y suis retourné à plusieurs reprises. C'est toujours émouvant. Les cimetiëre allemands sont aussi très impressionnants et on doit avoir pitié envers ces jeunes qui s'étaient fait tromper (mot très approprié cette semaine) par un tyran. Blogue.septentrion.qc.ca/Dean-Louder/2014/06/07/les-anniversaires-se-terminant-en-0-et-5-le-cas-du-debarquement-en-normandie/

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