vendredi 28 février 2014

Une identité chantée... Mince consolation...


Peut-on imaginer, un 1er juillet, à Québec, à Montréal, ou même à Gatineau (à l'ombre du Parlement canadien), un rassemblement de milliers de francophones de tous âges, agitant de rouges unifoliés à perte de vue devant une scène où les plus grands artistes québécois entonnent des chants patriotiques pour la Fête du Canada, pour célébrer notre appartenance aux Rocheuses, aux vastes Prairies, à la diversité culturelle de la Ville-Reine ou encore aux pittoresques côtes atlantiques? Non, cela est impensable...

Même les Anglo-Canadiens ne le font pas. Oh, bien sûr, ils participent à des rassemblements où des groupes «canadian» les divertissent, mais les musiques qu'ils entendent - sauf quelques airs folkloriques - ont peu à voir avec le beau, grand et bilingue pays qu'ils fêtent. Les vedettes de langue anglaise qui s'y livrent en spectacle chantent de populaires succès qu'on aurait de la difficulté à distinguer de ceux des artistes américains avec qui ils sont toujours en concurrence... Demandez-vous combien d'Américains, en écoutant Neil Young, pourraient deviner qu'il est anglo-canadien...

Au Québec, par contre, dans la plupart des villes et villages, tous les ans, à la Fête nationale, à la Saint-Jean, autour du 24 juin, des centaines d'artistes envahissent les scènes dans la plupart des villes et villages de toutes les régions pour fredonner, devant un auditoire fleurdelisé, des airs que le public connaît bien et dont les paroles célèbrent notre petite nation francophone qui s'entête à survivre dans ce coin de l'Amérique du Nord. Leur musique définit aussi le territoire de cette nation en le nommant, en identifiant ses paysages, ses traditions, ses localités. Il n'y a pas de doute : en musique, chez nous, il n'y a qu'un pays - le Québec.

Même à l'époque où nous nous appelions surtout Canadiens ou Canadiens français, jusqu'aux années 1960, nos hymnes traçaient les limites de notre contrée. Dans Le Canadien errant (http://bit.ly/1fwAKW0), quand Antoine Gérin-Lajoie, barde des Patriotes de 1837-1838, écrit « Si tu vois mon pays, mon pays malheureux », il évoque le Bas-Canada, les villages brûlés, Saint-Eustache, Saint-Benoît, Saint-Denis, les échafauds de Montréal, les déportations, les exils de gens d'ici. Du Saint-Laurent et de ses affluents.

On oublie trop souvent qu'Ô Canada fut à l'origine un chant patriotique québécois composé en 1880 pour les fêtes de la Saint-Jean Baptiste. Ô Canada, terre de nos aïeux? Ce n'est pas l'Ontario ou les Maritimes qu'on évoque, mais le Québec. D'ailleurs, si on retourne à la version originale, presque reléguée aux oubliettes, le deuxième couplet commence ainsi : « Sous l'oeil de Dieu, près du fleuve géant, le Canadien grandit en espérant... » Il n'y a qu'un fleuve géant, et il apparaît plutôt clair qu'en 1880, le Canadien est l'habitant qui parle français... Les autres, ce sont les Anglais...

Même en 1960, à l'aube de la Révolution tranquille, Claude Gauthier, dans la version originale du Grand six pieds, écrivait: « Je suis de nationalité canadienne-française ». Mais quelques années plus tard, avec la montée du mouvement indépendantiste, cela devint « de nationalité québécoise-française » (http://bit.ly/1kxEI5X). Mais ce que ça démontre, c'est que dans l'esprit du chansonnier, «canadien-français» et «québécois» avaient la même signification. Par la suite, les autres auteurs-compositeurs-interprètes eurent comme point de repère à peu près unique le Québec ou l'une de ses régions.

Dans le sillage des premières vagues du FLQ, en 1963, Raymond Lévesque a composé Bozo-les-culottes (http://bit.ly/1khPpwn). Trois fois, dans la chanson, il emploie le mot «pays», sans jamais préciser, même s'il est clair que l'histoire qu'il raconte se passe à Montréal: « Un jour quelqu'un lui avait dit, qu'on l'exploitait dans son pays»; « Tout le pays s'est réveillé »; et « Mais depuis que tu t'es fâché, dans le pays ç'a bien changé ». Nous sommes dans une période transitoire, mais le pays dont il est question ici, et qu'il ne nomme pas, est bel et bien le Québec. 

En 1965, quand Gilles Vigneault, dans Les gens de mon pays (http://bit.ly/1frt0ux), chante « ce neigeux désert où vous vous entêtez à jeter des villages », « des amours de village, voix des beaux airs anciens dont on s'ennuie en ville », on voit le gars de Natashquan, dans la Basse-Côte-Nord, faisant l'apprentissage de la métropole... Et quand il conclut « je vous entends demain parler de liberté », on sait que le «vous», c'est le Québec tout entier.

Le grand chansonnier qui n'avait pas vraiment été associé à l'évolution identitaire québécoise jusque là, Félix Leclerc, prendra un virage radical avec la crise d'octobre de 1970. L'année suivante, il compose L'alouette en colère (http://bit.ly/OKcc79), où il attaque l'injustice historique de front et identifie nettement le territoire : « J'ai un fils dépouillé comme le fut son père. Porteur d'eau, scieur de bois, locataire et chômeur dans son propre pays. Il ne lui reste plus qu'la belle vue sur le fleuve et sa langue maternelle qu'on ne reconnaît pas. » Tout y est !

Peu après, en 1972, Claude Gauthier présente au public Le plus beau voyage (http://bit.ly/1k8BqZB), l'hymne identitaire par excellence de l'époque. Il y revoit ses appartenances, qui sont aussi les nôtres. « Je suis de sucre et d'eau d'érable, de Pater Noster, de Credo », « Je suis d'Amérique et de France », « Je suis une race en péril », « Je suis notre libération », et la finale en crescendo... « Je suis Québec mort ou vivant ! » Le cheminement est complet. Plus de références ambiguës. On nomme le Québec comme patrie, comme cheminement, comme projet.

Il ne manquait qu'un hymne « national » pour le Québec, une chanson d'anniversaire pour la Saint-Jean, et ce fut Gilles Vigneault qui la composa en 1975. Gens du pays (http://bit.ly/NdIV3D et http://bit.ly/1exYoG7) s'est imposé instantanément, au point de remplacer le traditionnel « Bonne fête » dans l'ensemble de la société québécoise, et même chez les francophones hors Québec. C'est, depuis 1975, et de loin, la mélodie la plus souvent entendue au Québec, année après année.

On dirait que chaque crise apporte sa chanson et l'échec de l'Accord du Lac Meech, en 1990, aura été l'occasion d'une des fêtes nationales les plus mémorables et de l'interprétation d'une nouvelle chanson dont Diane Dufresne avait composé les paroles, Comme un bel oiseau (http://bit.ly/NwMDFb). « Je suis d'un Québec qui reprend ses ailes, la route est tracée, y'a plus rien pour m'arrêter. » Et cet avertissement à ceux qui auraient le goût de recommencer : « Ne mets plus jamais les pieds sur mon drapeau. » Le ton est dur, défiant.

L'échec du référendum de 1995 semble avoir jeté une douche froide sur plusieurs de nos compositeurs, sans toutefois modifier leur attachement identitaire. Des chansons comme En berne (http://bit.ly/1kyfaFN), des Cowboys fringants, en disent long sur le climat social en 2002 : « Dans un Québec en plein changement... Chu donc pas fier de ma patrie », « Dans ce royaume de la poutine, on s'complait dans la médiocrité », « Si c'est ça le Québec moderne, ben moi, j'mets mon drapeau en berne ». Et que dire du méga-succès de Mes Aïeux (2006), Dégénérations (http://bit.ly/1mOUCdB), un regard nostalgique sur un Québec passé... une toune trop populaire pour ne pas avoir touché une corde sensible...

En chanson, je trouve que nous ressemblons beaucoup aux Américains, qui ont eux aussi abondamment chanté leur pays, ses problèmes, son histoire et à peu près tous leurs villes et villages...  La différence, c'est que le pays que nous chantons n'est pas vraiment un pays, et que le pays dans lequel nous nous trouvons - le Canada - n'est à peu près jamais en évidence, musicalement du moins, ni en anglais ni en français, dans les grands succès entendus à la radio, en spectacle ou sur disque. Les Anglo-Canadiens ne chantent pas plus le Canada que nous...

Si nos chansons et le comportement de notre public constituent des indicateurs culturels valables, les Québécois, sur le plan identitaire, sont - et ce, depuis fort longtemps - de moins en moins canadiens et de plus en plus québécois. Mais cela ne semble rien changer à notre statut politique, où tout est figé depuis le coup d'État constitutionnel de 1982. Un jour si le Québec français disparaît de la surface de la terre sans avoir été mieux qu'une province pas tout à fait comme les autres dans une fédération qui ne l'a jamais vraiment reconnu, on pourra au mois dire qu'il a suscité de belles chansons...

Mince consolation...













mercredi 26 février 2014

Médias, sondages, Anglo-Québécois, exode...

Le travail des médias, et j'en fais partie depuis 45 ans, c'est essentiellement de renseigner le public, de l'informer. Pour moi, cela signifie que le coeur de la mission de la presse écrite et électronique, c'est de suivre et couvrir l'actualité, de rapporter les faits aussi fidèlement que possible, puis de les décortiquer, de les analyser, de les interpréter et même de les commenter.

Voilà pourquoi je suis toujours mal à l'aise quand les grands médias, qui en ont les moyens, commandent des sondages et en font leurs manchettes, particulièrement en période électorale ou durant de grands débats de société. Là, l'organe de presse ne couvre pas l'événement, il le crée. Cela peut sans doute être justifié à l'occasion mais le seuil de l'abus est vite franchi.

Quand, à quelques jours d'un scrutin ou d'un référendum, un journal ou une chaîne de télévision fait sa manchette avec son propre sondage sur les intentions de vote, reléguant au second plan les activités des partis et candidats, cela ne peut-il pas constituer une ingérence indue dans le processus démocratique?

Le fait de donner un parti gagnant dans un sondage n'a-t-il pas un effet sur le comportement des électeurs indécis? Cela ne contribue-t-il pas à décourager ou démobiliser ceux et celles qui se croient déjà rejetés par leurs concitoyens? Et sur le plan de l'information, cela ne peut-il pas froisser l'éthique journalistique en repoussant vers les pages intérieures ou vers la fin d'un bulletin une nouvelle qui aurait dû être présentée en manchette?

Si ma mémoire est bonne, depuis l'élection québécoise de 1970, la première que j'ai couverte pour Le Droit, les plus gros titres à la une des journaux durant les campagnes électorales ont été réservés aux sondages maison...

Mais il n'y a pas qu'en période d'élections que les organes d'information fabriquent des manchettes avec des sondages. L'exemple de CBC, avec sa nouvelle sur les non-francophones québécois qui ont songé à quitter le Québec pour aller ailleurs, principalement vers l'Ontario, est un classique.

Je serais prêt à parier de grosses sommes (si j'en avais...) que depuis les premières sorties de René Lévesque contre la domination anglophone au Québec (en pleine Révolution tranquille) et la campagne de 1962 sous le thème « Maîtres chez nous », une part appréciable de la population anglo-québécoise songe de temps à autre à quitter le Québec, avec des pointes en période électorale, après des victoires du Parti québécois, ou durant les deux campagnes référendaires...

Nos anciens Rhodésiens au passé raciste n'ont jamais pleinement digéré que les vaincus, jadis jugés inférieurs, veuillent devenir « maîtres chez eux » en donnant au français, par surcroit, le statut de langue commune et de seule langue officielle. Encore aujourd'hui, on a des relents de ces attitudes dans l'hystérie de certains médias anglophones, qui ont le culot de « nous » traiter de racistes et de xénophobes... eux qui n'ont d'ailleurs jamais compris le sens de ces concepts.

Alors le réseau anglais CBC aurait pu effectuer son sondage n'importe quand au cours du dernier demi-siècle, je crois qu'il aurait le plus souvent obtenu des résultats similaires, adoucis par moments, exacerbés par d'autres. Les Anglo-Québécois et les allophones anglicisés ou en voie d'anglicisation sont généralement mal informés en matière linguistique et ignorent tout du sort, bien pire, que subissent les francophones hors Québec depuis que la Confédération existe. Ils se plaignent le ventre plein, et une simple comparaison avec les Franco-Ontariens mettrait vite fin à leurs jérémiades.

Il n'y a pas de doute qu'au cours de la dernière année, le débat sur la charte des valeurs a déclenché des passions et que l'opposition à la charte rallie proportionnellement plus d'anglophones et d'allophones que de francophones. Et on voit encore cette vieille attitude chez plusieurs d'entre eux: faute de jouer selon leurs règles, ils plieront bagages... C'est facile à dire, dans l'anonymat, à une maison de sondage... et ça n'engage à rien.

Mais je reviens au point de départ. Un média commande un sondage qui devient sa manchette. Puis tous les autres médias en font leur manchette. Puis quantité de partis, d'organismes et d'individus réagissent au sondage des médias et il en résulte d'autres manchettes. L'organe d'information est-il resté fidèle à sa mission première?

Bien des commentateurs ont reproché au gouvernement Marois d'avoir voulu régler un problème qui n'existait pas avec le projet de charte. C'est un argument qui mérite qu'on en discute, et qui a une certaine valeur, même si je ne le partage pas. Mais les médias devront eux aussi se demander s'ils ne propulsent pas en manchette, à l'occasion, des titres sur des « nouvelles » qui n'en sont pas, sur des informations créées et non couvertes...

Les sondages font partie de l'arsenal de la presse, et je ne réclame pas qu'on les censure. Mais un débat éthique sur leur usage serait pleinement justifié...







lundi 24 février 2014

Les «choses» et les «affaires»...


Nous étions attablés au souper dominical, il y a de cela cinq ou six ans, et parlions - je ne sais trop pourquoi - de diabète. Devant le regard interrogateur de ma petite-fille Sophie, qui avait alors quatre ou cinq ans, on a tenté tant bien que mal de lui expliquer en mots simples les problèmes liés à la teneur de sucre dans le sang... Puis, du haut de sa culture pré-maternelle, elle nous lance: vous parlez de glycémie? Silence surpris et admiratif. Elle connaissait le mot juste et l'avait employé, sans hésitation...

Dans des milieux agressivement bilingues (pour les francophones du moins) comme celui de Gatineau et d'Ottawa (et, de plus en plus, Montréal), on s'habitue vite à entendre une langue truffée d'anglicismes, avec un vocabulaire pauvre et un parler à faire grincer des dents nos anciens professeurs de français. Je ne blâme personne. Notre situation géographique, les exigences du travail, la technologie, les pressions sociales, tout joue en faveur de la domination de la langue anglaise et nous laisse, comme le disait la poète Michèle Lalonde, «notre parlure pas très propre, tachée de cambouis et d'huile».

Bien sûr, on rencontre ça et là de rares bilingues «parfaits», maniant aussi bien le français que l'anglais et suscitant l'admiration de tous. Mais pour la plupart des gens (et je m'inclus), la coexistence des deux langues finit le plus souvent par affaiblir l'une et l'autre. La réflexion suivante de l'auteur Fernand Ouellette, rapportée en 1965 dans la revue Esprit, pourrait aussi bien avoir été rédigée en 2014 et décrit avec justesse le processus d'apprentissage linguistique d'une proportion importante des jeunes francophones:

« Mes réflexes verbaux s'étaient longtemps nourris du franglais. Et mon comportement linguistique était, en bonne partie, déterminé par ces réflexes. Car au stade de l'apprentissage, ou bien nos proches ignoraient le mot français correspondant à l'objet, ou bien ils se servaient du mot anglais. Beaucoup d'objets de ma vie quotidienne n'avaient pas de nom ou leur nom était maladroitement et pernicieusement calqué sur celui (de l'anglais), quand on n'employait pas le nom (anglais) lui-même. On me façonnait à coups de "choses" et d'"affaires". »

Ma petite-fille avait employé le mot glycémie, au lieu de parler «d'affaires» ou de «choses» liées au sucre dans le sang... Le commentaire de Fernand Ouellette m'est revenu à l'esprit ce matin alors que je visitais le complexe sportif de Gatineau. Dans l'ascenseur, deux professeurs ou étudiants en éducation physique jasaient : «C'est cool de faire son training à la maison», dit l'un. «Moi je dois aller au lab», répond l'autre. Et ça, c'est anodin. Dans certaines écoles françaises de la région, on doit menacer les élèves francophones de sanctions pour les obliger à parler français entre eux dans les couloirs...

Dans les conditions qu'on nous impose, particulièrement dans les régions urbaines où francophones et anglophones se côtoient, «il est impossible de vraiment vivre en français, il est illusoire de penser qu'on reliera au langage la parole par le moyen d'une double langue comme le prétend la philosophie du bilinguisme», écrivait le romancier Jacques Brault dans la revue Liberté, ajoutant que, depuis deux siècles «nous souffrons d'une hémorragie sémantique». Et d'affirmer Fernand Ouellette: «Peu à peu le comportement linguistique (du francophone) est déterminé par une conception de survivance. Dès lors cette langue n'est plus en expansion naturelle; on l'a emmurée; elle se momifie.»

Ces auteurs, dans leurs commentaires, pensaient à la situation au Québec. S'ils avaient vécu en Ontario, l'horreur aurait été totale dans les milieux urbains abritant de fortes proportions de francophones. Dans son livre Les insolences du bilinguisme (1987), André Richard, ancien directeur d'école française à Ottawa, insiste sur les effets extrêmes d'un bilinguisme quotidien et collectif : «Certaines personnes se disent francophones ou encore canadiennes-françaises alors qu'elles parlent principalement l'anglais à la maison, ne lisent que les journaux anglais et ne regardent jamais la télévision en français. Pour ce qui est de leurs activités à l'extérieur du foyer, tout se passe en anglais, tout simplement.» Mais si on les interrogeait, plusieurs d'entre eux se diraient fiers bilingues...

Le français possède un riche vocabulaire qui, trop souvent, repose en paix dans les pages de nos dictionnaires... Il sert peu ailleurs, du moins dans l'espace «francophone» nord-américain. En science comme en loisirs, en mécanique comme dans le sport, les mots français (qu'on n'a jamais appris ou qu'on a oubliés faute de les utiliser) existent. Alors pourquoi notre langue parlée et écrite continue-t-elle de s'appauvrir? Comment, dans l'état actuel des «choses» au Québec, peut-on songer à implanter l'anglais intensif pour tous les jeunes francophones quand la qualité du français dépérit à vue d'oeil? On n'a qu'à écouter le bruit de la rue, les lignes ouvertes à la radio, les entrevues à la télé, ou suivre le Web pour le constater...

J'ai rencontré l'an dernier l'adjoint d'un professeur qui venait de corriger plus d'une centaine de dissertations en français en dernière année du baccalauréat. TOUS les étudiants ont perdu des points à cause de la mauvaise qualité du français écrit... TOUS !!!

Il est sans doute plus facile de chanter aveuglément les louanges du bilinguisme que de retrousser ses manches et de bien apprendre son français. Pas que le bilinguisme, et à plus fort titre le plurilinguisme, ne soit pas un choix personnel attrayant. Ce l'est. Malheureusement, le bilinguisme collectif, tel qu'on le pratique ici, ne constitue guère qu'une étape vers une anglicisation massive d'ici quelques générations.

Il est toujours temps de donner un vigoureux coup de barre mais dans le climat actuel, tout semble indiquer que l'érosion graduelle et collective du français se poursuivra dans l'indifférence générale. On se contentera sans doute de protéger du bout des lèvres les principes de la Loi 101 jusqu'à la fin... et peut-être même après, comme souvenir de ce qui fut jadis...












samedi 22 février 2014

Bande de caves !



En février 1965, dans la revue française Esprit qu'il dirigeait, Jean-Marie Domenach faisait le point sur la turbulence de l'évolution récente du Québec et du Canada français. Il y consacrait de longues et douloureuses pages à l'humiliation historique (et courante) de la langue française au Canada. Notant que la moitié des Canadiens français étaient alors contraints de gagner leur vie en utilisant l'anglais, il conclut: «Cette servitude douloureuse, authentique aliénation, ne peut à la longue produire que l'assimilation ou la révolte.»

Ce dilemme reste actuel en 2014, après un demi-siècle où l'assimilation paraît avoir marqué plus de points que la révolte. Mais c'est quoi, au fond, l'assimilation? Ce processus de passage du français à l'anglais reste mal connu, tant au Québec qu'ailleurs au pays. On l'a quantifié à partir des recensements et documenté dans de savantes analyses chiffrées, oeuvres de statisticiens, politicologues, sociologues ou, pire, de journalistes. Ce qui manque le plus souvent à ces exposés, c'est la dimension humaine, personnelle. L'assimilation est un phénomène collectif, mais c'est aussi - et surtout? - vécu au quotidien, au travail, à la maison, dans les loisirs... jusque dans l'âme.

Aujourd'hui, l'abandon du français se fait en douce. Ce ne fut pas toujours le cas. En Louisiane, durant la première moitié du 20e siècle, on battait physiquement les élèves qui osaient parler français à l'école. Au Québec et au Canada, après la conquête, la répression du français a été constante. En Ontario, ma province natale, en 1912, on a interdit l'enseignement en français à l'école après la 2e année du primaire et les séquelles de cette interdiction ont été ressenties dans toutes les générations qui ont suivi. On nous a fait savoir brutalement qui était le maître et qui faisait les lois !

Paul Chamberland écrivait dans la revue Parti Pris en novembre 1963: «C'est dans le tissu de sa vie concrète, de ses activités journalières, que le Canadien français du Québec (et à plus fort titre celui de l'Ontario) souffre de sa condition de dominé politique, économique et social.» Dans la ville d'Ottawa où j'ai grandi, les francophones ont toujours été, du moins jusqu'à récemment, des citoyens de 2e ordre, victimes d'un racisme non déguisé d'une part appréciable de la majorité anglophone. Cela se vivait tous les jours, partout. Et peu de gens osaient protester.

Protester dans la vie quotidienne, j'entends. Combien de francophones osaient demander leurs billets d'autobus en français quand j'étais jeune? C'était s'exposer à des regards souvent hostiles de chauffeurs unilingues anglais, voire à des rebuffades. Combien osaient exiger des services en français dans certains hôpitaux de la capitale quand leur santé, ou pire, celle d'un de leurs enfants, était en jeu? S'adresser en français au dépanneur ou à l'épicerie? Ou, oh horreur, tenter de traiter en français avec les administrations municipale et fédérale? Mais c'était, et ça demeure, un combat constant...

Combien d'individus sont-ils en mesure de soutenir ce stress continuel, matin, midi et soir, jour après jour, de savoir qu'on devra lutter pour que sa langue soit respectée? Pour la plupart, c'est trop demander. Après quelques mois, quelques années, quelques générations, on flanche. Le combat constant use. L'humain aspire tout naturellement à une vie paisible, agréable. Omer Latour, un auteur franco-ontarien que tous gagneraient à mieux connaître, l'a très bien exprimé dans l'introduction à son recueil de nouvelles intitulé Une bande de caves (publié aux Éditions de l'Université d'Ottawa en 1981 après sa mort).

Il écrit à propos de ses concitoyens anglicisés de Cornwall: «L'assimilation totale apporte enfin le repos et la paix à tous ces gens obscurs qui ont lutté dans un combat par trop inégal. Vous me demandez pourquoi ils sont morts? Je vous demande comment ils ont fait pour résister si longtemps.» Son livre, presque introuvable aujourd'hui, met en lumière, à partir d'expériences réelles vécues sans doute dans sa jeunesse (années 50 et 60?), le mépris haineux d'une certaine classe d'anglos de Cornwall (et d'Ottawa, pourrais-je ajouter) à l'endroit de Canadiens français qu'ils jugeaient inférieurs dans leur langue comme dans leur humanité. C'est un livre qu'il faut lire pour comprendre l'assimilation dans ses tripes.

Je me suis demandé en le lisant qui était la Bande de caves? Les racistes anglophones ou les victimes francophones qui subissaient en silence, tête baissée, les humiliations quotidiennes? Puis j'ai retrouvé cette citation célèbre de Claude Péloquin, qui avait marqué son époque à la fin des années 1960 : «Vous êtes pas tannés de mourir, bande de caves...» Dans un article du Devoir, en 2006, le regretté Michel Vastel expliquait : «Se faire rétrograder sans cesse, rapetisser, humilier, et sans jamais réagir, aura fait d'eux des colons qui inspirèrent ce cri du coeur du poète.» Ainsi l'appellation «bande de caves» aurait visé les victimes qui, incapables de relever la tête et de se révolter, adoptent la langue et la culture des auteurs de leur répression.

Omer Latour, lui, faisait partie des révoltés. Il faudra un jour raconter en long et en large l'histoire de sa vie et de ses oeuvres. Son parcours est unique. Franco-Ontarien né à Cornwall durant la Dépression (1935), membre des premières vagues du Front de libération du Québec (FLQ), arrêté et emprisonné à Montréal pour activités terroristes en 1964 à l'âge de 29 ans, il devint par la suite professeur de français langue seconde en Ontario et signa une série de livres de nouvelles dont le dernier est justement Une bande de caves. Il est mort en 1978 lors de vacances à Cuba.

Comme dirait Aznavour, Omer Latour parle d'un temps que les jeunes de 20 ans ne peuvent pas connaître. Moi, j'ai 67 ans et j'ai connu, durant les 30 années que j'ai vécues en Ontario et même après, des anglophones comme ceux qu'évoque l'auteur d'Une bande de caves. J'en vois encore les relents dans de nombreux articles, chroniques, éditoriaux et commentaires du Canada anglais contemporain. Et pendant ce temps, au Québec, tous les partis et la majorité du public épousent dans une inconscience totale la bilinguisation de la dernière année du primaire dans les écoles françaises... L'assimilation ou la révolte? Au rythme où vont les choses, aura-t-on d'ici quelques générations «le repos et la paix» de l'assimilation totale?

L'histoire dira-t-elle un jour que nous nous sommes comportés comme une bande de caves?





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* recommandation de lecture : Le ciel peut donc attendre, de Jules Tessier, publié en 2013 aux Éditions de la Francophonie, et notamment son chapitre intitulé Cornwall (Ontario): là où ça fait mal! où l'auteur évoque l'oeuvre d'Omer Latour, ainsi que deux autres livres en lien avec Cornwall et la situation des Franco-Ontariens, L'anglistrose, de Roger Levac, et Le dernier des Franco-Ontariens, de Pierre Albert. Un merci spécial à M. Tessier qui m'a fait découvrir ces livres.




mardi 18 février 2014

Je me souviens? Vraiment?



Ces jours-ci, je me dis souvent que jamais un peuple n'aura eu si mauvaise devise. « Je me souviens »... Ouais... Il fut peut-être une époque où nous étions davantage, et peut-être même trop souvent, tournés vers le passé. Pas aujourd'hui. La moitié du temps, comme collectivité, on ne semble pas trop savoir d'où l'on vient, ce qui fait que durant l'autre moitié, on ne sait plus trop où l'on va.

Le poète Paul Chamberland aura-t-il finalement eu raison quand il écrivait en 1964, dans L'afficheur hurle, que « nous n'aurons été qu'une page blanche de l'histoire », « un peuple jamais né, une histoire à dormir debout, un conte qui finit par le début » ? Pendant qu'on en finit plus de papoter sur le contenu de cette histoire qu'on enseignera ou pas à des jeunes (et vieux) qui en auraient bien besoin, l'histoire que d'autres fabriquent à notre place, souvent contre nous, finira par nous achever...

Le gouvernement fédéral nous assomme depuis deux ans et plus avec sa vision trafiquée à l'anglo-canadienne militaro-royale de la Guerre de 1812, et a volontiers consacré des dizaines de millions à une propagande dont, heureusement, le niveau d'efficacité semble avoir été presque nul au Québec. Mais comme dit le vieux dicton: mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose. Le seul gouvernement qui aurait tant soit peu pu rétablir les faits, le Québec, n'a rien fait et quand on voit la dynamique des forces en présence, on sait pourquoi. L'histoire est un baril de poudre avec une mèche très courte...

En fin de semaine, le 15 février, quelques centaines de personnes ont souligné ça et là le 175e anniversaire de la pendaison de cinq illustres Patriotes de 1837-1838, dont Chevalier de Lorimier et Charles Hindelang, qui ont laissé d'émouvants textes écrits dans les jours précédant leur mort et même le matin où ils sont montés sur l'échafaud. La rébellion de 1837 est bien plus importante pour la démocratie et pour l'évolution du Québec et du Canada que le bicentenaire de la Guerre de 1812, mais Ottawa n'y voit pas de capital politique à engranger et Québec, comme toujours, est paralysé... Alors on oublie...


                            Warren Perrin

Qui s'imposera comme champion de la mémoire collective, comme incarnation du « Je me souviens » qui orne nos armoiries? Trouvera-t-on ici un Warren Perrin, cet avocat cajun de Lafayette, en Louisiane, qui a brassé la cage de la Grande-Bretagne pendant plus de dix ans, entre 1990 et 2003, pour arracher à la Reine des excuses officielles pour la déportation des Acadiens de 1755? Il n'a pas obtenu tout ce qu'il voulait, mais sa campagne a eu des échos en Europe, en Acadie canadienne, au Québec et au Parlement fédéral, et débouché sur une Proclamation royale de reconnaissance des torts en 2003, un an avant le 400e anniversaire de la présence acadienne en Amérique du Nord.

Y a-t-il au Québec un historien, un politicien, un juriste, un professeur, un militaire, un syndicaliste, un descendant de patriote, quelqu'un de crédible, ayant la couenne aussi dure que Warren Perrin, prêt à mobiliser les gens autour d'une campagne visant à commémorer de façon officielle et populaire des événements essentiels de notre passé?

L'ampleur des crimes contre l'humanité subis par la nation acadienne dépasse ceux perpétrés par le Vieux Brûlot et ses troupes durant la rébellion de 1837-1838. Mais la Grande-Bretagne a commis des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité au Québec aussi en 1837-1838-1839, avec des villages incendiés, des innocents emprisonnés, déportés et assassinés, des femmes violées. et toutes sortes de souffrances infligées à un peuple largement sans défense qui ne voulait qu'une reconnaissance élémentaire de ses droits humains et collectifs.


Que les 175 ans du 15 février 1839 n'aient pas été l'objet de cérémonies et de rassemblements populaires partout au Québec constitue une honte nationale. Quelques jours avant de monter sur l'échafaud, de Lorimier écrivait à un de ses amis : « Puissiez-vous rappeler quelquefois la mémoire de votre ami malheureux mort sur l'échafaud pour racheter son pays opprimé ». En 2014, l'oeuvre des Patriotes reste inachevée et Chevalier de Lorimier et ses compatriotes ne méritent pas de sombrer dans l'oubli collectif.

La monarchie qu'ils ont combattue reste en place, et Québec a tous les outils pour se transformer aujourd'hui en république, qu'il quitte ou non la fédération canadienne. La Charte des valeurs constitue un pas important dans cette direction. L'affirmation de la neutralité religieuse de l'État entraîne automatiquement le rejet d'Élizabeth II comme chef d'État du Québec puisque cette dernière doit, en vertu des règles de succession, être l'un des chefs de l'Église anglicane et que le trône britannique est interdit aux catholiques. Elle est un signe religieux très, très ostentatoire.

Quant au reste, le pays que souhaitaient créer autour du Saint-Laurent les Patriotes de 1837 a été étouffé dans l'oeuf par l'Acte d'Union de 1840 et la Confédération en 1867. Mais le rêve reste vivant et les projets d'État à notre image abondent. Quelle forme il prendra, entre le fédéralisme actuel et l'indépendance, reste à déterminer. Mais de grâce, ne préparons pas l'avenir avec des « coupes à blanc » dans notre passé.









mardi 11 février 2014

20 années perdues ?


Faire le ménage de ses vieux dossiers, c'est un peu comme voyager dans le temps. Justement, hier, j'ai trouvé, au fond d'un tiroir, une vieille chemise de coupures de presse sur la situation linguistique au Québec et ailleurs au Canada, dans les années 1990, que j'ai relues avec beaucoup d'intérêt. Or, ce qui m'a le plus frappé, c'est que quinze ou vingt ans plus tard, en 2014, on parle encore de ces mêmes problèmes, et qu'aucun d'entre eux n'a été résolu...

Dans un article du 13 janvier 1993 du quotidien Le Droit, le journaliste Michel Hébert analyse les données linguistiques du recensement de 1991 et fait état d'une anglicisation de plus en plus accélérée des francophones hors Québec, et ce, même dans la région frontalière d'Ottawa. On croirait lire (avec quelques variantes mineures) les conclusions d'un examen du recensement de 2011... Et, dans la même page du Droit, le Commissaire fédéral aux langues officielles, Victor Goldbloom à l'époque, propose d'assouplir la Loi 101 sur l'affichage et d'ouvrir les écoles anglaises du Québec aux immigrants...

L'année précédente, le quotidien La Presse publiait un article de la Presse canadienne dans lequel il était précisé, se fondant sur une étude du ministère ontarien de l'Éducation, que 44% des jeunes Franco-Ontariens de 8e année parlaient plus souvent l'anglais que le français à la maison.. Ces proportions sont-elle moins menaçantes en 2014? Il serait intéressant de vérifier...

Une seconde analyse publiée dans Le Droit en janvier 1993 par le chroniqueur Adrien Cantin reprend le thème de l'assimilation des francophones en Ontario et dans les autres provinces à majorité anglaise. Son jugement est plus lapidaire. «Il faut savoir que dans des provinces comme les Prairies et Terre-Neuve, on pratique depuis toujours un véritable génocide culturel envers les francophones», écrit-il. Le scribe aurait pu énoncer les mêmes conclusions aujourd'hui...

Quelques mois plus tard, le 19 mai 1993, le journaliste Paul Gaboury du Droit rapporte que dans les bureaux fédéraux situés sur la rive québécoise de l'Outaouais, la langue de travail reste l'anglais, et que les fonctionnaires francophones n'osent pas en parler publiquement par crainte de représailles... À lire le plus récent rapport du Commissaire fédéral aux langues officielles, Graham Fraser, je suis prêt à parier que les choses n'ont pas beaucoup changé...

Le même jour (19 mai 1993), dans Le Droit, la journaliste Dianne Paquette-Legault fait état de la publication du 2e volume d'une trilogie intitulée «La dualité linguistique à l'Université d'Ottawa», par l'ancien recteur Roger Guindon, inconditionnel du bilinguisme. La discussion sur le sort du français à l'Université d'Ottawa se poursuit depuis ce temps, sans solution pour les francophones dont la situation est de plus en plus précaire dans cette institution bilingue. Cette année, un projet d'université de langue française se précisera en Ontario et le principal obstacle sur son chemin restera l'Université d'Ottawa...

Pendant ce temps, le sort des Anglo-Québécois continuait d'alimenter des médias de langue anglaise qui dépeignent trop souvent la majorité francophone du Québec comme une nation xénophobe, intolérante et haineuse. En 1992, Josée Legault avait publié, en réponse, un livre intitulé L'invention d'une minorité, les Anglo-Québécois, dans lequel elle affirmait que c'était le français et non l'anglais qui était menacé à Montréal. Et que l'anglais attirait davantage les immigrants que le français... Il me semble que des propos tout à fait similaires continuent de noircir les pages des journaux de 2014...

Pendant ce temps, fin 1992 début 1993, des parents franco-manitobains s'adressaient à la Cour suprême du Canada pour confirmer leur droit de faire instruire leurs enfants en français dans des écoles «de même qualité et de même valeur» que celles mises à la disposition des enfants de langue anglaise, ainsi que la gestion et le contrôle de leurs institutions scolaires... Un droit élémentaire assuré aux jeunes Anglo-Québécois depuis la Confédération... Le combat des minorités francophones hors-Québec se poursuit encore sur plusieurs plans aujourd'hui...

Parfois, le combat des francophones se déroule en territoire québécois... En 1997, Le Droit évoque la lutte d'un groupe de pompiers de Cantley (municipalité rurale à 90% francophone au nord de Gatineau) pour instaurer le français comme langue de travail... Avec un chef et un adjoint anglophones au service des incendies de la municipalité, il y avait un usage systématique de l'anglais à l'ouvrage... Encore aujourd'hui, dans certains coins de l'Outaouais, notamment dans le Pontiac, l'anglais s'impose...

De l'autre côté de la rivière, en avril 1993, des municipalités à majorité francophone se voyaient interdire le droit d'adopter leurs règlements en français, même si tous les débats au conseil municipal se déroulaient dans cette langue. «Les francophones de l'Ontario ont moins de droits que les anglophones du Québec», affirmait alors le maire de l'ancienne ville de Vanier (maintenant un quartier d'Ottawa), Guy Cousineau.

La mesquinerie des médias anglo-ontariens, dans les années 1990, ne se limitait pas à pourfendre les maudits séparatistes du Québec. Des francophones avaient traîné le Toronto Sun devant le Conseil de presse de la province parce que ce dernier avait écrit qu'il en coûterait moins cher d'acheter une maison neuve au Québec pour chacun des 800 auditeurs torontois du réseau de télévision française de l'Ontario (TFO) que de continuer à payer 30 millions $ par année pour l'exploitation du réseau. L'inexactitude des chiffres, doublée d'un soupçon de nettoyage ethnique, ne dérangeait pas le Sun en 1993. Je pense qu'on en lit des pires en 2014...

En 1997, le Québec-bashing et le franco-bashing ont étaient tels dans les médias anglos que même quelques anglophones ont protesté. Le rédacteur en chef de l'hebdo Hour, Peter Scowen, allait jusqu'à écrire (citation du Devoir) : «Le dénigrement continuel de la réputation des Québécois francophones par le Canada anglais équivaut à l'une des entreprises de diffamation d'un peuple les plus outrancières et soutenues de l'histoire de ce pays.» Qu'écrirait-il aujourd'hui?

Je pourrais citer d'autres articles de la petite collection que j'ai retrouvée... L'impression que tout cela me laisse, c'est que nous avons perdu notre temps depuis 20 ans face à une majorité anglo-canadienne pour qui la moindre concession est devenue impensable... Nos trois chances de débloquer le contentieux constitutionnel (Lac Meech en 1990, Charlottetown en 1992 et le référendum de 1995) ont eu pour seule conséquence de renforcer un statu quo pourri...

En dépit de mes convictions laïques et de mon appui inconditionnel à la charte des valeurs, je commence à croire que le temps est venu de brûler quelques lampions à l'église paroissiale, ou d'entreprendre une neuvaine à St-Jude, patron des causes désespérées... Si on ne donne pas bientôt un solide coup de masse dans l'échafaudage, je risque fort de retrouver cette petite chemise de textes en 2034 (si je suis toujours vivant...) et de me voir obligé d'en arriver aux mêmes conclusions qu'en 2014...





samedi 8 février 2014

Les anciennes juges et la charte...

Les juristes ont beau connaître les lois, ils se contredisent souvent quand vient le temps de les interpréter dans la vraie vie. On l'a vu ces derniers jours avec les prises de position, diamétralement opposées, de Louise Arbour et de Claire L'Heureux-Dubé sur le projet québécois de charte des valeurs (Projet de loi 60). Ce sont là deux anciennes juges de la Cour suprême du Canada, deux sommités du droit, l'une appuyant le projet de charte, l'autre le vilipendant.

«Il ne fait aucun doute que, telle que proposée, la Charte porte atteinte à la liberté de religion et que les justifications de cette atteinte à un droit fondamental protégé par le droit québécois, la constitution canadienne et le droit international sons clairement insuffisantes», écrite Louise Arbour. Notez le langage. C'est vraiment pas au conditionnel : «il ne fait aucun doute»! Et vlan! Voilà! C'est réglé? Heu, peut-être pas...

En face d'elle, Claire L'Heureux-Dubé réplique, sur un ton tout aussi affirmatif, tout aussi définitif: «Rien dans le projet de loi 60 n'entrave la croyance religieuse et la pratique de la religion.» Et elle ajoute, pour enfoncer davantage le clou: «Les signes religieux font partie de l'affichage de ses croyances religieuses et non pas d'une pratique de la religion».

Personnellement, je suis en désaccord avec les deux ex-juges... Je crois que l'interdiction du port de signes religieux trop visibles constitue une limitation réelle de la liberté d'expression et de la liberté de religion, mais qu'il s'agit d'une limitation raisonnable (en vertu de l'article 1 de la Charte canadienne) pour atteindre l'objectif primordial d'une neutralité religieuse de l'État et d'un respect intégral de l'égalité hommes-femmes.

Quoiqu'il en soit, ce que je veux souligner ici, c'est que même chez les juges, et même chez des juges ayant siégé à la Cour suprême du pays, ce qui apparaît blanc à l'un peut paraître noir à l'autre, clair à l'un, flou à l'autre... Les cours de haute instance regorgent de décisions collectives où une majorité de juges l'emporte sur une minorité de dissidents. Et que parfois (souvent? toujours?), des convictions personnelles qui n'ont rien de juridique viennent perceptiblement colorer les socles du droit.

Je n'en veux pas aux juristes qui puisent dans leur expérience de vie, dans leurs connaissances, dans leurs idées, dans leurs opinions politiques même, pour orienter leurs prononciations légales. Personne - même un juge de la Cour suprême - ne vit dans un vacuum. Ce qu'on a vécu explique beaucoup ce que l'on devient. Certains juges sont conservateurs, d'autres progressistes. Certains sont fédéralistes, d'autres indépendantistes. Certains sont nationalistes, d'autres pas. Et n'allez pas me dire que cela n'influence pas leur lecture des lois et projets de loi...

Le problème, c'est que hors des lois et de leur interprétation, les juristes, même les plus prestigieux, sont des citoyens comme vous et moi. Leur expertise professionnelle peut contribuer à éclairer les grands débats sur les valeurs, comme toute autre expertise, mais elle reste un éclairage parmi d'autres.

Quand Louise Arbour dit que l'interdiction des signes religieux pour le personnel de l'État porte atteinte aux droits constitutionnels, elle y met le poids de son immense savoir juridique. Mais quand elle trouve «évident» que cette même interdiction vise avant tout les femmes musulmanes qui portent le foulard, qu'elle trouve cela «particulièrement odieux», et quand elle évoque au passage «la pathologie des nationalismes d'extrême-droite», ouvrant la porte à de nouveaux dérapages médiatiques (voilà un excellent dossier pour la FPJQ...), elle dépasse largement ses champs d'expertise.

Comme ancienne juge, elle peut s'exprimer plus librement sur le plan politique qu'à l'époque où elle rédigeait des décisions à la Cour suprême. Mais pour les citoyens et, malheureusement, pour certains scribes qui manipulent ses textes d'opinion dans des médias déjà survoltés, la distinction entre Louise Arbour juriste émérite et Louise Arbour citoyenne est loin d'être claire.

Même chose pour Claire L'Heureux-Dubé, qui du haut de son perchoir juridique, puise dans son expertise pour affirmer une distinction légale entre la pratique d'une religion et l'affichage (par des signes ostentatoires) d'une religion. Elle en conclut que l'interdiction des signes ne viole aucun droit fondamental. Va jusque là. Mais quand Mme L'Heureux-Dubé attaque la position de Philippe Couillard qu'elle dit en contradiction flagrante avec la tradition de ce parti, elle passe en mode citoyen...

C'est curieux... Comme citoyen, et comme journaliste d'expérience (tiens, moi aussi, je réclame une certaine expertise qui a, comme toutes les expertises, ses limites...), il me semble que le principe de neutralité religieuse de l'État inscrit dans le projet de charte suscite peu de débats de fond, et que l'interdiction de signes religieux ostentatoires pour le personnel de l'État vise et interpelle tout le monde, même si les médias ont exacerbé le débat autour du sort de certaines femmes musulmanes.

Il me semble, par ailleurs, à revoir l'histoire de l'humanité, que les intégrismes religieux mariés à l'État ont commis parmi les pires horreurs, et qu'il faut s'en méfier encore aujourd'hui. Et qu'à ce titre, il est légitime, dans une démocratie laïque où tous les citoyens, hommes et femmes, sont égaux, que l'État demande à son personnel de proposer à l'ensemble des citoyens non seulement une neutralité réelle dans les services rendus, mais aussi un visage de neutralité.













mardi 4 février 2014

Nom à vendre... Des preneurs?

          L'actuel aréna Robert-Guertin (Photo P. Woodbury, Le Droit)

Ainsi ma ville - Gatineau puisqu'il faut à regret la nommer - a finalement décidé de «vendre» à un commanditaire privé le nom de notre futur complexe multifonctionnel (sports, spectacles, congrès) pour une modeste contribution de 150 000 $ par année aux coffres municipaux!

Des «pinottes», si l'on songe aux 63 millions de dollars déboursés par l'ensemble des citoyens de la municipalité (et du Québec) pour en réaliser la construction, et les futurs millions pour en assurer le bon fonctionnement... Mais il semble que pour nos élus, le fait que le public assume la totalité de la facture ne suffit pas pour lui autoriser le droit de baptiser le future centre sportif...

C'est une maladie répandue, cette manie de placarder le nom d'entrepreneurs ou d'entreprises privées sur des lieux publics construits avec l'argent du public. Nos deux grandes salles d'urgence hospitalières, à Gatineau, portent désormais le nom de gourous de l'électricité et de la margarine. De bien bonnes gens, généreux en plus, mais qui ont eux aussi amassé leurs richesses en vendant des biens et services à ce même public... qui finit toujours par tout payer sans obtenir de reconnaissance...

J'ai la conviction qu'un entrepreneur privé qui investirait 63 millions $ de ses avoirs personnels pour construire un édifice de prestige en choisirait très certainement le nom... Il n'en céderait pas l'identité à un quelconque commanditaire en retour d'un dépôt d'à peine 150 000 $ (environ 1/4 de 1% du coût...) par année à son entreprise...

Alors, sans débat apparent au conseil municipal, nos élus permettront en notre nom que le futur centre/aréna/salle de spectacle, qui servira entre autres de domicile aux Olympiques de Gatineau (hockey), porte un nom qui n'aura peut-être rien à voir avec sa vocation... et qui risque de changer au fil des ans si le commanditaire principal plie bagages...

À Ottawa, en vingt ans seulement, les Sénateurs de la LNH ont joué successivement au Palladium, un nom approprié, puis au Centre Corel, puis à Place Banque Scotia et maintenant au Centre Canadian Tire... Et ce sera quoi le prochain? À Montréal et à Toronto, les légendaires Forum et Gardens ont été remplacés par des noms sans âme et sans fantômes... Mais ça, c'est l'industrie privée et ça ne me concerne pas... Le futur complexe multifonctionnel de Gatineau, ce sont nos dollars citoyens qui l'auront érigé...

Alors Dieu sait quel nom finira par porter notre centre régional de sports et de spectacles... A-t-on seulement pensé à la langue... La plupart des grandes marques commerciales ont des noms anglais... Mais cela ne dérange pas grand monde ici, dans une région où tout, me semble-t-il, finit par se faire angliciser. Même l'aréna Robert-Guertin est devenu au fil des décennies « Bob » Guertin... Enfin...

Hé, tous les mécènes, y'a quelqu'un qui veut mettre un petit 150 000 $ de sa réserve pour voir son nom associé à une bâtisse très publique, qui sera mentionnée tous les jours dans les médias en rapport avec des événements sportifs, artistiques ou autres? Nos représentants élus ayant un sens peu développé de leurs responsabilités en cette matière, ils vous offrent une occasion en or de mettre votre nom sur nos 63 millions $...

Tiens... aidons-les... Suggérons-leur des commerces qui pourraient servir d'identité à notre bien collectif... En voici quelques-uns, certains plausibles, d'autres moins, certains loufoques...

1. Centre Costco Wholesale. Tant qu'à insulter le public francophone sur les murs de ses entrepôts avec un nom qui fait fi de la Loi 101, pourquoi ne pas en profiter pour injurier les citoyens ailleurs?

2. Centre Ultramar, Shell ou Esso... Avec les fortunes qu'elles nous arrachent à la pompe et leurs profits obscènes, les pétrolières ne s'apercevraient même pas d'un trou de 150 000 $...

3. Centre Tim Horton... Au moins le Tim original était un ancien joueur de hockey de la LNH... et ces commerces poussent comme des champignons... Pourquoi pas un « méga » Tim ?

4. Centre Walmart... le nom que je choisirais dans mes pires cauchemars... et tiens, on pourrait dé-syndiquer les employés chargés de l'entretien du centre pour faire plaisir à la gang à Walton...

5. Centre Canadian Tire... Ils ont déjà les Sénateurs à Ottawa... pour 150 000$ de plus ils pourraient compléter le balayage et empocher le domicile des Olympiques de Gatineau...

6. Centre Couche-Tard... Au moins c'est français, et les activités finissent souvent tard en soirée... et tiens, pour eux aussi, on pourrait dé-syndiquer les employés...

7. Avec Apple comme commanditaire, ça pourrait devenir le « iCentre » de Gatineau...

8. Centre « La Trappe »... Entre « La Trappe à Fromage » et la « trappe » au hockey, il y a au moins des affinités de langage...

9. Centre « Payless », si commandité par la chaîne Payless Shoe Store... mais cela n'aurait pas de sens dans un aréna où c'est toujours « paymore »...

10. L'ultime, avec un partenariat de quelques-unes des meilleures patateries (meilleures selon moi bien sûr...) de la région... ce pourrait devenir le « Centre Ga-Ga Patate/Bob Patate/Patate dorée ». Personne ne l'oublierait et ça ferait le tour de la planète...

Enfin, quelqu'un a sûrement de meilleures idées... Tant qu'à se faire vendre, aussi bien participer... Envoyez vos suggestions au conseil municipal...

La mienne, c'est que le nom soit proposé par un comité approprié et choisi par ceux et celles qui ont payé ce stade, ou par nos représentants élus... mais ça, c'est déjà rejeté...



samedi 1 février 2014

Pembroke et la francophonie... le feu et l'eau...

Le titre dans l'édition du quotidien Le Droit du 16 janvier 2014 m'avait fait sursauter: «Pembroke veut mettre en lumière sa communauté franco-ontarienne». Pourquoi diable une municipalité comme Pembroke, un des coins de l'Ontario où les francophones ont été les plus maltraités depuis la Confédération, voudrait-elle honorer ce qui reste de sa petite collectivité franco-ontarienne? Après avoir lu l'article, j'ai vite compris que les autorités de cette petite ville du Haut-Outaouais ontarien n'y étaient pour rien...

Il s'agissait d'un projet émanant d'un groupe de francophones de Pembroke, sous la gouverne de la régionale Champlain de l'Association canadienne-française de l'Ontario, qui proposent d'ériger à cet endroit un « monument de la Francophonie », surplombé d'un drapeau franco-ontarien vert et blanc géant. Il existe déjà 14 de ces monuments ailleurs, concentrés dans la région d'Ottawa. Si jamais celui de Pembroke voit le jour, j'espère que celui-là, plus que les autres, servira à rappeler les effets quasi génocidaires du racisme anglo-canadien. Un monument à ce qui aurait pu être, et qui a été étouffé !

Dans la seconde moitié du 19e siècle, la population de la vallée du Saint-Laurent explosait, avec un taux de natalité faramineux. Que serait devenu le Canada si toutes ces gens avaient pu s'installer, dans le respect de leur langue et de leur culture, ailleurs au pays? L'Ontario était voisin, et plusieurs y ont élu domicile. L'Ouest s'ouvrait à la colonisation, mais pas pour les francophones du Québec... qui, dans le sillage des rébellions Métis, n'y étaient pas les bienvenus. Alors nos gens ont traversé par dizaines de milliers la frontière américaine et aujourd'hui, ils ont près de 12 millions de descendants aux États-Unis.

Si seulement la moitié de ces exilés avaient pu trouver bon accueil en Ontario, dans le Manitoba alors bilingue, ou sur les plaines de la Saskatchewan et de l'Alberta, et si leurs droits n'avaient pas été piétinés partout, qui sait s'il n'y aurait pas aujourd'hui deux ou trois provinces à majorité française au lieu d'une? Et quelle serait la dynamique du pays si la moitié de la population était francophone, au lieu d'un peu plus de 20%? Enfin, cela appartient aux historiens du ce-qui-serait-arrivé-si... Et ces mêmes historiens pourraient alors se pencher sur la petite histoire de Pembroke.

Siège social d'un diocèse catholique qui n'a jamais favorisé les francophones, qui les a parfois ouvertement persécutés, et qui contrôle encore aujourd'hui les paroisses francophones du Pontiac québécois; municipalité située le long de la rivière des Outaouais, et dont l'influence a contribué à assimiler les francophones de la rive québécois, une assimilation qui se poursuit sous le regard indifférent du reste du Québec; Pembroke fut l'un des théâtres de la lutte contre le Règlement XVII du gouvernement ontarien. Ce règlement adopté en 1912 interdisait l'enseignement en français après la deuxième année du primaire.

En 1923, cela faisait déjà dix ans que les élèves franco-ontariens subissaient la répression linguistique. Et n'oubliez pas que cela se passe dans des écoles catholiques contrôlées par une majorité irlandaise anglophone. La seule institutrice capable d'enseigner en français, Jeanne Lajoie, venait d'être congédiée par la commission scolaire. À la demande de parents canadiens-français, Mme Lajoie accepte d'enseigner illégalement dans une école francophone « libre », que fréquentent dès la première année 55 élèves (combien sont restés à l'école anglaise? Sait pas...)


                                Jeanne Lajoie

Elle y ruinera sa santé, passant même ses étés à recueillir des fonds pour « l'oeuvre » de l'école. Épuisée, Cette femme qui devient « l'héroïne » de Pembroke se voit obligée de quitter l'enseignement trois ans plus tard et après cinq ans dans un sanatorium, meurt en 1931. D'autres figures légendaires du temps, dont le vieux Alfred Longpré, animèrent les efforts des francophones. L'époque a été marquée par des souffrances, des privations, et ces interminables quêtes de fonds auprès d'une population déjà pauvre pour offrir aux jeunes Franco-Ontariens une fraction de ce que les petits Anglo-Québécois recevaient en surabondance.

Leur combat, voilà ce qui mérite d'être souligné et honoré par un éventuel monument de la francophonie. Un monument et un drapeau à la mémoire de quelques héros du passé, de leurs modestes succès, et un rappel sans réserve de la persécution qu'ils ont subie. Aujourd'hui, le combat est à toutes fins utiles terminé. Selon le dernier recensement, il ne reste à Pembroke que 285 personnes (sur une population de 14 350) ayant le français comme langue d'usage à la maison. À peine 2% de la population. Ils sont encore près de 1000 en utilisant les statistiques de la langue maternelle (6,6%).

Mais quelle était leur importance en 1912 au moment de la tentative génocidaire du gouvernement ontarien? Il faudrait fouiller les recensements. J'ai pu reculer jusqu'en 1951, où près de 14% de la population de Pembroke était toujours de langue maternelle française. Si l'on compare à d'autres régions minoritaires de l'Ontario, on pourrait sans doute croire que le taux d'assimilation avoisinait déjà les 50%, et que près de 30% ou même le tiers des gens de Pembroke avaient des ancêtres francophones... On en voit tous les jours, même du côté québécois, dans le Pontiac, des gens aux noms français qui ne parlent plus la langue depuis quelques générations...

La région d'Ottawa et la vallée de l'Outaouais, en montant vers Pembroke, ont compté parmi les coins les plus racistes de l'Ontario, notamment à l'égard des francophones. Il existe encore aujourd'hui des relents de cette intolérance. Que le petite minorité de Franco-Ontariens qui s'agite toujours dans la région de Pembroke veuille aujourd'hui un monument de la francophonie, cela mérite l'appui de tous. C'est à la fois un moyen d'honorer quelques-uns des nôtres, qu'il ne faudra jamais oublier, et aussi une épine au flanc de la majorité anglophone, pour lui rappeler son passé raciste et souligner qu'elle n'a pas réussi à nous éliminer tous... Un doigt d'honneur...

Mais la question reste intéressante... De quoi aurait l'air la francophonie de Pembroke en 2014 si les Franco-Ontariens avaient eu les même avantages que les Anglo-Québécois?