jeudi 7 juillet 2016

Une Loi 101 pour les taxes scolaires!!!


Dans un tiroir que je n'aime pas ouvrir, au fond de mon cerveau, je conserve une impression qui ressurgit de temps à autre. La Loi 101, me dis-je, doux-amer, ne visait pas que les anglophones et allophones récalcitrants. Elle avait aussi pour but de mettre au pas ces milliers de francophones qui, trop longtemps colonisés, s'affichaient volontiers en anglais ou auraient inscrit leurs enfants aux écoles anglaises…

Le libre choix aux francophones en matière linguistique aurait sans doute menacé la pérennité du français au Québec tout autant, ou presque, qu'une liberté totale accordée aux non-francophones. Ça, Camille Laurin le savait sans doute en 1977 quand il a fait adopter la Charte de la langue française. Depuis 2011, l'accueil plus qu'enthousiaste au projet d'anglais intensif à l'élémentaire témoigne de l'extrême fragilité de la volonté de francisation au sein de la majorité francophone…

Alors qu'il faudrait renforcer une Loi 101 triturée par les tribunaux depuis les années 1980, une mixture toxique de coups bas et de négligence continue de la mettre à genoux. Alors que le français langue de travail agonise à Montréal et que les transferts linguistiques vers l'anglais deviennent alarmants de recensement en recensement, le gouvernement de Philippe Couillard voudrait que tous les jeunes Québécois apprennent l'anglais…

Ces derniers jours, on a appris à Gatineau, d'abord sur les ondes de la radio 104,7FM puis dans les pages du quotidien Le Droit et à la télé locale (Radio-Canada et TVA), qu'un libre choix partiel pour le paiement des taxes scolaires menace l'équilibre fiscal entre commissions scolaires francophones et anglophones - au détriment, du moins en Outaouais, des commissions scolaires de langue française. Que les médias nationaux à Montréal, à Québec et ailleurs n'aient pas propulsé cette nouvelle en manchette constitue un scandale!

Ce qu'il faut savoir, c'est que la Loi sur l'instruction publique oblige les contribuables qui ont des enfants à l'école à payer leurs taxes à la commission scolaire que fréquentent leurs enfants. Donc, ces francophones paient leurs taxes aux commissions scolaires de langue française, et ces anglophones aux commissions scolaires anglaises. Le problème survient quand le contribuable n'a pas d'enfants à l'école: il ou elle peut payer ses taxes scolaires à n'importe quelle commissions scolaire sur son territoire, y compris aux écoles anglaises…

Or, quand la nouvelle s'est propagée que la Commission scolaire anglaise Western Québec demandait 22$ de moins par année en taxes scolaires que la Commission scolaire francophone des Draveurs (secteur est de Gatineau, ainsi que les municipalités de Cantley, Val-des-Monts et Denholm), pas moins de 4130 francophones du territoire des Draveurs, sans enfants à l'école, ont signifié leur intention de payer leurs taxes à Western Québec.

En 2015-2016, la CS des Draveurs a perdu 6% de ses contribuables et les francophones qui continuent de payer leurs taxes aux écoles françaises verront leur facture bondir de 5%, et ce, après des hausses coriaces ces dernières années. Que 4130 francophones abandonnent les écoles françaises pour 22$ en dit long sur la situation économique en 2016, et témoigne encore davantage de leur indifférence totale à l'endroit du sort de la langue française en Outaouais et ailleurs au Québec…

Qu'ils aient le droit de la faire, légalement, n'a aucun sens et menace de saper l'une des bases financières du réseau des écoles françaises et de la Loi 101. Le quotidien Le Droit a publié la nouvelle (voir bit.ly/29diDxq) mais n'a fait aucun suivi jusqu'à maintenant. Même chose pour les médias électroniques. Au moins en a-t-on parlé dans les pages et sur les ondes locales. Et les autres régions du Québec? Qu'arriverait-il à Montréal si, pour une différence de 22$, 25000 contribuables francophones sans enfants à l'école décidaient tout à coup de payer leurs taxes à la commission scolaire anglophone?

Selon quel principe abroge-t-on - avec raison - le libre choix de l'école pour les francophones et allophones, pour ensuite le réintroduire quand arrive la facture de taxes scolaires? Ça n'a aucun bon sens et ça va carrément contre tout ce que représente la Loi 101. Les députés de la région gatinoise ont été informés, et n'ont rien déclaré en public quant à leurs intentions. Cela ne me surprend guère. Ils n'ont pas levé le petit doigt pour défendre les francophones en Outaouais depuis des lunes…

Si le gouvernement Couillard ne colmate pas cette brèche inexcusable, il s'en fera le complice. Il doit légiférer sans délai. Quant aux grands médias nationaux, presse imprimée comme radio, télévision et Web, je m'interroge de plus en plus sur leur capacité de saisir l'importance de certaines nouvelles et sur leur volonté de les couvrir comme il se doit.

Celle-ci est majeure, et le silence médiatique est assourdissant...


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Lien à la nouvelle de Radio-Canada Gatineau bit.ly/29lqchI
Lien à la nouvelle de TVA Gatineau bit.ly/29lUvEI



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