mardi 14 octobre 2014

Québec français, Ottawa bilingue… même combat!

Après avoir lu les propos délirants de Gilles Paquet, professeur émérite de l'Université d'Ottawa, publiés dans un texte d'une rare férocité où il attaque les promoteurs d'un statut bilingue officiel pour la ville d'Ottawa, vus comme des «intégristes» à l'origine d'un climat de «terreur», il est impérieux que des voix se fassent entendre pour remettre les pendules à l'heure.

Je craignais, en lisant les comptes rendus*(voir liens à la fin du texte de blogue) dans Le Droit et Radio-Canada, que les titres et les citations rapportés ne rendent pas justice à l'ensemble de ses arguments, présentés dans un texte plus étoffé sur le site optimumonline.ca, ou que les journalistes aient cédé devant la tentation de monter en épingle les propos les plus extrêmes du professeur Paquet. Ce n'est pas le cas. De fait, après lecture complète de son pamphlet venimeux (sept pages en petits caractères) intitulé Bilinguisme officiel pour Ottawa? Non, et voilà pourquoi!, on constate que l'original est encore plus horrifiant que les résumés médiatiques. On se demande de fait si l'auteur est toujours en contact avec la réalité franco-ontarienne…

Il faudrait, pour y répondre, prendre les pages une à une pour démontrer à quel point certaines des accusations de M. Paquet sont gratuites et la distance qui sépare son royaume imaginaire du vécu des francophones dans la ville d'Ottawa. Le cadre de ce blogue se prête peu à un tel exercice mais je m'y astreindrai s'il le faut. Je conçois par ailleurs qu'il soit possible de valoriser le bilinguisme officiel dans la capitale canadienne, ou de s'y opposer, en se fondant sur un cheminement rationnel qu'on pourra juger au mérite.

SEUL le français est menacé!

Ce qu'il faut rétablir au départ, c'est la réalité. La base historique, la pierre d'assise, le fondement de tous les conflits linguistiques au Canada (y compris au Québec), de toutes les récriminations, de toutes les revendications, a été et reste aujourd'hui la protection et la promotion de la langue et de la culture françaises. SEULE la langue française est menacée au pays, que l'on se trouve à Montréal, à Ottawa, à Moncton ou à Saint-Boniface au Manitoba. Si on s'éloigne de cette réalité, si on l'oublie en chemin, plus rien n'a de sens et on aboutit à des prises de position comme celles du professeur Paquet.

Même la Cour suprême du Canada, dans quelques-uns de ses jugements sur la Charte des droits et libertés, sur les droits scolaires des minorités francophones et sur la Loi 101, a reconnu la symétrie de l'argument des francophones hors-Québec et des Québécois francophones. Les juges fédéraux ont accepté comme une évidence que le français, minoritaire au Canada et en Amérique du Nord, est menacé en Ontario, dans l'Ouest et dans les Maritimes, mais aussi au Québec. La protection et la promotion du français justifient donc un certain unilinguisme français au Québec mais aussi des régions tampons bilingues à l'extérieur du Québec!

J'ai de la difficulté à croire que M. Paquet ait étudié à fond les statistiques linguistiques des recensements fédéraux depuis un demi-siècle. L'érosion du français hors-Québec, et même dans certains coins du Québec, est démontrée dans toute sa froide horreur statistique. Et si le professeur de l'Université d'Ottawa veut une dimension plus humaine, il n'a qu'à se promener dans les écoles franco-ontariennes pour constater quels défis les enseignants et les administrations scolaires doivent relever pour assurer la pérennité du français au sein des générations futures.

Les lois sont des outils

Une fois accepté ce constat du besoin de défendre et de promouvoir la langue française, au Québec comme à l'extérieur du Québec, le professeur Paquet aura encore besoin d'un bon cours d'histoire. Il verra comment les provinces à majorité anglophone ont jugé bon, partout, d'utiliser leurs lois pour éliminer des droits linguistiques scolaires que la Constitution de 1867 n'avait pas protégés. Et il devra se rendre à l'évidence que sans l'article 23 de la Loi constitutionnelle de 1982, les minorités francophones hors-Québec seraient encore souvent sans écoles bien à elles et que, surtout, elles n'en auraient pas la gouvernance.

Si les lois n'avaient aucune utilité, on laisserait la société dans une bienfaisante anarchie… Or, à Ottawa comme dans l'ensemble de l'Ontario, le fait est que depuis la Confédération, les francophones ont été persécutés à diverses époques et qu'aujourd'hui, en dépit de très nettes améliorations dans les politiques de services en français, ils restent largement victimes de négligence. Et que là comme ailleurs, si des individus plus militants, plus engagés que d'autres ne prenaient pas l'initiative de mobiliser l'opinion publique et d'avoir recours aux tribunaux, la protection et la promotion du français resteraient le dernier des soucis d'une majorité anglophone souvent hostile et de médias anglo-canadiens qui versent parfois dans l'hystérie…

Ottawa officiellement bilingue et Gatineau officiellement unilingue? Oui, en effet! Parce qu'aux deux endroits, seul le français a besoin de protection et de promotion. Que les anglophones aient de la difficulté à comprendre ça, je peux concevoir. Mais que cela puisse échapper à un universitaire francophone, sommité dans son domaine, vivant dans la région d'Ottawa depuis plus de 40 ans, ça, je ne le comprends pas. Le Québec français et l'Ottawa bilingue, c'est le même combat, pour les mêmes motifs. Et si cela offusque des individus et des groupes anglophones qui n'hésiteraient pas à nous enlever les droits que nous leur avons arrachés, si cela crée des frictions au sein de la «dualité» canadienne, si cela trouble une paix linguistique dont les francophones ont toujours fait les frais, eh bien, M. Paquet… tant pis!

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* Liens aux textes
Le Droit - bit.ly/1z5LomF
Radio-Canada - bit.ly/1voOMqv
Texte intégral de M. Paquet - bit.ly/1trxU2f


2 commentaires:

  1. Bilinguisme Canadian "Coast to coast" :
    De la baie des Chaleurs à la rivière des Outaouais.

    Liste des régions bilingues du Canada aux fins de la langue de travail

    http://www.tbs-sct.gc.ca/pubs_pol/hrpubs/offlang/chap5_1tb-fra.asp

    À l’extérieur du Québec, on dirait le gruyère des réserves indiennes, des townships en Afrique du Sud ou de la Palestine !!!!

    Le Canada a complètement abandonné sur les francophones dans les quatre provinces de l'ouest, y inclus Saint-Boniface au Manitoba, qui est à 85% anglais aujourd'hui..
    Rare comme de la merde de pape, lorsqu’on s’éloigne des frontières du Québec et surtout…où le nombre le justifie !!!

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  2. Les langues des signes et les langues autochtones méritent beacoup plus d'appui que le français. Sens appui pour ces langues-là, la défense du français est illégitime.

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