samedi 28 février 2015
Un petit coin de paradis...
Après quelques heures au Salon du livre de l'Outaouais (SLO), cet avant-midi (j'y étais allé aussi jeudi soir), j'en suis arrivé à la conclusion qu'il y a toujours lieu d'espérer pour la civilisation de l'imprimé. Les deux salles et les couloirs, regorgeant d'éditeurs et de livres, étaient bondés de visiteurs! Une ambiance absolument festive! Des jeunes, des vieux, des familles entières, circulant de kiosque en kiosque, jasant avec les auteurs, s'agglutinant autour de personnages de bandes dessinées ou de romans pour enfants (comme Geronimo Stilton), écoutant des conférences ou des tables rondes… et achetant des livres. Pas des écrans. Des volumes imprimés. Avec de l'encre. Sur du papier!
J'aurais bien aimé que les oracles de malheur de l'empire Power-Desmarais-Gesca, qui brûlent d'impatience à l'idée de liquider leurs journaux papier, aient l'occasion d'arpenter les allées achalandées du SLO (http://www.salon-livre-outaouais.ca), d'y voir des centaines, des milliers de personnes - dont nombre de leurs lecteurs et lectrices - prendre dans leurs mains et offrir à leurs yeux, leur cerveau et leur âme autre chose qu'un écran… pour ensuite rapporter chez eux des livres qu'on peut lire avec l'ensemble des sens - voir de ses yeux le texte et les images; toucher la couverture et les pages; entendre le doux froissement du papier; sans oublier l'odeur fraîche d'un livre tout neuf… Aucune tablette numérique ne peut procurer un tel plaisir.
Des grands classiques de l'antiquité aux plus récentes livraisons des maisons d'édition, des formats poche aux éditions de luxe, des essais philosophiques aux romans policiers aux bandes dessinées, le coeur de la francophonie bat vigoureusement ici, pendant les quatre jours du Salon du livre de l'Outaouais 2015, du 26 février au 1er mars. Plus de 400 auteurs et auteures, des centaines de milliers de livres et des dizaines de milliers de participants de tous âges... sous le même toit, au centre-ville de Gatineau. Un phénomène assez unique, dont on ne retrouve pas l'équivalent sur la rive anglo-ontarienne…
Quand je suis arrivé vers les 10 h, ce matin, il y avait tellement de monde qu'il fallait faire la file pour prendre l'escalier roulant qui mène à l'étage du Salon du livre… À l'intérieur, le bruit de la foule était un amalgame de conversations, d'éclats de rire, de salutations, et de cris d'enfants… Comme une très, très grande famille qui se rassemble pour faire la fête, pour célébrer, pour se voir et se reconnaître… En avalant un dîner rapide et un bon café à la foire alimentaire, avec un livre que je venais d'acheter bien sûr, et jetant un coup d'oeil à toutes ces gens qui faisaient comme moi, entrant et sortant du Salon du livre avec le sourire, j'avais la sensation d'avoir déniché un petit coin de paradis…
Vivement que les auteurs et auteures continuent de nous alimenter en livres et en articles de journaux et de magazines. Que les imprimeurs continuent de les imprimer. Que les libraires continuent de les vendre. Que le public continue de les acheter. Pour que des salons du livre continuent d'exister. Pour que de grands empires cupides ne puissent, un jour, nous obliger à tout prendre à l'écran (à leurs écrans)… Ils commencent aujourd'hui par les journaux, mais n'allez pas croire qu'ils vont s'arrêter là…
Et surtout n'allez pas croire qu'ils ont d'abord à coeur nos intérêts, ou encore la diversité culturelle… ou même la liberté de presse ou la liberté d'expression… La productivité, l'efficacité, la couleur de l'encre dans les bilans financiers passent bien avant… Et n'oublions jamais que notre journal en version papier et les livres qu'on range dans nos bibliothèques nous appartiennent. Ces écrits restent et resteront dans la mesure où nous les conservons. Veut-on vraiment voir venir le jour où toute notre information émanera d'un écran que de puissants intérêts (économiques, politiques) pourraient contrôler, modifier (ou éteindre…) à notre insu?
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Un signe des temps? Jusqu'à récemment, Le Devoir et Le Droit avaient des kiosques au Salon du livre de l'Outaouais. Le Devoir y est toujours et utilise le Salon pour vendre des abonnements en Outaouais. Le Droit, cependant, tout en continuant d'être associé au Salon, n'y a plus de présence physique sous forme de kiosque et de présentoir de journaux… Dans quelques années, si on croit les frères Desmarais, grands patrons de l'empire Power-Gesca, il n'y aura même plus de Droit en version papier… Mais c'est un sujet que les quotidiens de l'empire soumettent à une stricte censure… une bonne raison pour éviter des lieux publics comme un salon du livre…
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