mercredi 4 février 2015

Région de Prescott-Russell: française en 1951, bilingue en 2011...


Trouver des données en ligne pour les recensements d'avant 2001 n'est pas nécessairement chose facile. Et le défi est multiplié quand on veut consulter de très vieux recensements (1961 et avant) pour esquisser des portraits linguistiques de localités et régions, afin d'être en mesure de les comparer aux chiffres du plus récent recensement, celui de 2011.

Il faut, à toutes fins utiles, s'adresser à Bibliothèque et Archives Canada (Statistique Canada ne répond que pour les recensements récents). J'ai donc formulé une requête, et obtenu quelques tableaux sur les cueillettes de 1951 et 1941. Heureusement, j'avais déjà en main les publications pertinentes du recensement de 1961, les ayant conservées de l'époque où je travaillais comme étudiant à l'ancien Bureau fédéral de la statistique.

J'ai donc sorti ma loupe (on utilise ça à 68 ans…), imprimé les colonnes de chiffres et commencé à effectuer des calculs et des comparaisons. C'est la seule façon, et je sais que je ne retrouverai pas ailleurs, ou autrement, ce que je cherche. Malheureusement, ce genre de fouille n'intéresse à peu près personne dans le monde médiatique. Les conclusions, cependant, attirent parfois des lecteurs et lectrices…

L'Est ontarien: Prescott-Russell

Je ne sais pas jusqu'où me mèneront mes découvertes, mais je n'ai aucun doute que mes connaissances et intuitions de la situation linguistique des francophones, au Québec et hors-Québec, seront davantage approfondies. Pour le moment, après un coup d'oeil préliminaire, j'ai déjà appris quelque chose d'intéressant sur les comtés de Prescott et Russell.

Ces comtés, jadis séparés mais qu'on appelle aujourd'hui Comtés Unis (Prescott-Russell), sont les régions les plus francophones de l'Ontario, avec l'extrême nord de la route 11 dans la région de Hearst. Si, dans quelques générations, l'assimilation réduit la francophonie ontarienne à la marginalité dans certaines régions urbaines ainsi que dans des coins de la province où les Franco-Ontariens sont déjà fortement minoritaires, on peut toujours espérer qu'ils soient encore majoritaires entre les banlieues est d'Ottawa et la frontière québécoise.

Francophonie bilinguisée...


Le portrait de cette francophonie a cependant beaucoup changé depuis le recensement de 1951. Elle est beaucoup plus bilingue qu'il y a 60 ans, un signe inquiétant en soi étant donné qu'un bilinguisme collectif massif signifie généralement - du moins dans notre coin d'Amérique - l'amorce d'une transition linguistique et identitaire vers l'anglais… et, éventuellement, l'unilinguisme anglais.

La différence majeure entre 1951 et 2011 réside dans le nombre et la proportion d'unilingues français dans les comtés de Prescott et Russell. Il y a 60 ans, de toute évidence, on n'avait pas beaucoup besoin de connaître l'anglais pour vivre à des endroits comme Rockland, Embrun, Bourget, Casselman, Alfred ou Hawkesbury… En effet, au début des années 1950, plus de la moitié des citoyens du comté de Russell (50,2%) ne parlaient que le français! Dans Prescott, la proportion d'unilingues français était de 45,1%.

Quand on combine les deux comtés, cela donne pour 1951 une région où 47,2% de tous les résidents ne connaissent que le français. Et il y avait à peine 14% d'unilingues anglais. Le reste de la population était bilingue. On comptait donc, dans Prescott et Russell, 47,2% ne parlant que le français, 39% le français et l'anglais, et 14% d'anglophones unilingues.

De 47% d'unilingues français à 13% !

Passons à 2011 pour constater l'évolution depuis l'époque pré-télévision. Aujourd'hui, seulement 12,9% de la population est unilingue française alors qu'environ 21% sont unilingues anglais. La quasi-totalité du reste parle les deux langues. En chiffres absolus, le nombre d'unilingues français est passé de 20400 en 1951 à 10780 en 2011, alors que la population des comtés unis a doublé (de 43000 à 83000). Le nombre d'unilingues anglais (6116 en 1951) dépasse le seuil des 17500 au recensement de 2011. 

En 1951, donc, 86% de la population pouvait s'exprimer en français, contre 53% en anglais (quand on compte les bilingues). En 2011, 79% de la population est capable de s'exprimer en français, mais 87% des citoyens de Prescott-Russell connaissent l'anglais. La vaste majorité reste de langue maternelle française, mais il n'y a pas de doute que l'anglicisation est en marche!



À suivre...





1 commentaire:

  1. La Minister Madeleine Meilleur des Francophone Affairs en Ontario se contredit!!!


    Dans The Ottawa Citizen du Monday, January 07, 2008, elle dit :

    « Ontario francophones threatened, Meilleur says »
    « Les francophones d’Ontario sont en péril, dit la ministre!!! »

    http://www.canada.com/ottawacitizen/news/story.html?id=5f4d16bc-7e0d-4434-8651-9d76e9739969

    Dans l'édition 2005 des Profils statistiques sur les francophones en Ontario, du 27 septembre 2005, elle conclut :

    « Soyez assurés, je suis très optimiste. J'ai la ferme conviction, plus que jamais, que l'avenir appartient aux francophones de l'Ontario. »

    http://www.ofa.gov.on.ca/francais/stats.html

    Vous trouverez, ci-dessous une lettre que je lui ai adressée en octobre 2005.

    Laurent Desbois

    Ex-franco-Ontarien,
    fier Québécois depuis trente ans
    et canadian… par la force des choses et temporairement …. sur papiers seulement!
    ------------------------------------------------------------

    L'honorable Madeleine Meilleur
    Ministre de la Culture et ministre déléguée aux Affaires francophones

    Objet : L'Édition 2005 des Profils statistiques sur les francophones en Ontario du 27 septembre 2005

    http://www.ofa.gov.on.ca/francais/stats.html

    Les jeunes francophones représentent environ 3,6 % de l'ensemble des jeunes ontariens. Les francophones de 65 ans et plus en Ontario représentent 5,6 % de la population provinciale. Ceci représente une réduction de 36% de la population totale entre ces deux groupes d’âge.

    La population francophone de l'Ontario a connu une augmentation de 1,2 % entre 1996 et 2001. Vous commentez : « C'est un pas dans la bonne direction! ». Comment pouvez-vous conclure ainsi, lorsque durant cette même période, la population totale de l’Ontario a augmenté de 6,1%, soit cinq fois plus rapidement?

    Le taux de conversation du français à la maison continue de diminuer, soit de 58,7% à 56,5% entre 1996 et 2001. Je vous souligne qu’il était de 61% en 1991. (en 2006, c'est le cas chez seulement 55 % de la population francophone).


    Madame la ministre, vous concluez votre discours comme suit : « Soyez assurés, je suis très optimiste. J'ai la ferme conviction, plus que jamais, que l'avenir appartient aux francophones de l'Ontario. ».

    Pouvez-vous m’indiquer quels résultats dans ce rapport vous portent à conclure ainsi?

    Merci de votre attention,

    Laurent Desbois
    Ex franco-Ontarien
    Longueuil (Québec)

    1 octobre 2005

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