Ceux et celles qui me connaissent savent que j'adore les discussions et les débats. J'aime contester, et être contesté. Du choc des idées jaillit la lumière, dit le vieux proverbe. Mais justement, peu importe le degré de «muscle» qu'on met dans le ton des échanges, cela doit rester dans l'univers des idées. Verser sans justification évidente dans l'insulte personnelle ou le procès d'intention est inacceptable. On passe alors du débat au combat… le plus souvent stérile et sans issue.
Je me souviens de mes premières années comme journaliste au quotidien Le Droit, fin années 1960 début années 1970. Un étranger arrivant à la salle des nouvelles aurait pu croire, parfois, en entendant les voix animées, que certains étaient sur le point d'en venir aux coups. De gauche à droite, tout y passait dans nos quasi-engueulades. Puis c'était fini, les tapes dans le dos, et tout le monde traversait la rue amicalement pour une bière autour de la même table.
C'est ainsi que je vois les échanges, qu'ils aient l'allure d'un dialogue serein ou d'un affrontement vigoureux. À la fin, rien n'est personnel. Du moins je l'espère.
Si j'aborde cette question dans le cadre de mon blogue, c'est qu'une de mes récentes offrandes, portant sur le cri du coeur de Marie-France Kenny, présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne, a été publiée dans le Huffington Post Québec (http://huff.to/1GjxBKM) et qu'au-delà des des «J'aime» et partages Facebook, et des gazouillis sur Twitter, le texte a suscité quelques centaines de commentaires d'un peu partout au pays.
Je suis fasciné par ce phénomène, parce que durant les douze années où j'ai rédigé des éditoriaux au Droit, le quotidien ne permettait par les commentaires de lecteurs et lectrices directement sur le site Web, à la suite de textes d'opinion, comme Le Devoir ou le Journal de Montréal. Alors, constatant le va-et-vient d'opinion via HuffPostQuébec à la suite de mon billet intitulé Fêter les 150 ans du Canada? Non merci!, j'ai tout imprimé pour tenter d'en faire une synthèse.
J'aurais peut-être dû m'y attendre, étant habitué aux excès de la twittosphère, mais je dois avouer que j'ai été surpris - et attristé - par la virulence de certains propos ainsi que la méchanceté de nombre d'injures personnels (entre lecteurs surtout, et parfois envers l'auteur), et la rareté de commentaires portant sur la substance du texte de blogue, ou sur un prolongement opportun de l'argumentaire proposé - notamment sur les moyens de commémorer dignement le 150e anniversaire de la Confédération sans toutefois la fêter…
Ce n'est pas en répondant ainsi à un interlocuteur qu'on le convaincra de la valeur de ses propos: «Tu es né épais ou c'est venu avec l'âge? Ou es-tu tombé sur la tête un jour pour nous ennuyer avec les mêmes bêtises?». Ou encore: «Vos stupidités et élucubrations, je ne les lis pas.» Ou encore: «Indépendantistes méprisants et méprisables, continuez de vous vautrer dans votre ignorance…» Ou encore, sans possibilité de réplique: «T'es un christ de moron»… Et pour conclure: «Fuck you. Je vais les fêter moi (Canada 150) et pas un criss va m'empêcher!»
J'ai aussi été frappé par le nombre d'affirmations erronées ou de généralisations gratuites, inventées ou reprises d'autres sources qui les avaient sans doute propagées, sur lesquelles on construit des conclusions tout aussi erronées. Bien des gens auraient avantage à s'informer davantage (et je m'inclus au cas où je l'aurais fait moi-même) avant de trop s'avancer sur Internet, où les écrits ont tendance à rester plus souvent qu'à s'effacer…
Ainsi on apprend que le drapeau québécois a été piétiné à Belleville en 1995 (c'était Brockville, en 1989), que Louis Riel a été pendu en 1840 (c'était en 1885), que 1 100 000 francophones hors-Québec «vivent en français» (pourtant ils sont seulement 664 000 selon la langue la plus souvent parlée à la maison), que le taux d'assimilation est de 50% depuis le bilinguisme à Trudeau (je ne sais pas d'où vient cette statistique). Et je ne compte pas les affirmations excessives condamnant ou louangeant les grandes options de l'heure, entre les indépendantistes purs et durs et les fédéralistes intraitables…
Je n'ai rien contre les indépendantistes purs et durs, ni contre les fédéralistes intraitables, même si mes propres positions, parfois complexes vu mes racines franco-ontariennes profondes et tenaces, me situent plus près des premiers que des seconds, mais le débat ne progressera pas à coups d'insultes et de propos blessants. Le choc peut être musclé, mais de grâce, tenons-nous en dans la mesure du possible aux faits et aux idées.
Bonjour M. Allard,
RépondreSupprimerVotre rappel de la nétiquette est très à propos. En circulant sur les réseaux sociaux nous découvrons le monde des idées sous un nouveaux jour dans lequel il est tentant de réagir un peu trop promptement! Je vous remercie pour votre générosité à prendre le soin de nous rappeler le cadre dans lequel il est préférable de nous tenir intellectuellement afin de prolonger les échanges dans les lieux publics que sont ces réseaux.
À François Poulin, merci d'avoir lu et commenté. J'apprécie.
SupprimerBonjour monsieur Allard,
RépondreSupprimerJ'ai découvert votre très intéressant blogue par hasard. Comme ma mère est née à Bourget, que je visite encore souvent la région et ce, depuis mon enfance (75 ans), que j'y ai encore des membres de ma famille, j'apprécierais pouvoir ajouter mes opinions sur votre blogue.
Merci
Gilles Sauvageau
L'Assomption
Québec
N'hésitez pas. J'apprécie! Au plaisir.
SupprimerJe viens de découvrir votre blogue et je me suis permis d’afficher certains de vos articles sur le site Web du Mouvement pour une capitale du Canada officiellement bilingue (www.capbilcap.ca), dans la section Revue de presse. Vous contribuez vraiment au débat sur les questions qui m’intéressent actuellement, soit la francophonie, le français, le bilinguisme et l’assimilation. C’est bien dommage que les gens qui publient des commentaires à la suite d’articles publiés dans les journaux ou autres médias démontrent autant d’ignorance et de virulence, mais ce n’est pas un nouveau phénomène et il va sûrement continuer. Pour pouvoir contribuer de façon intelligente à un débat, il faut avoir des idées et des connaissances et savoir comment les présenter. Malheureusement, même des gens qui en ont se laissent séduire par la méchanceté et la mesquinerie, comme Gilles Paquet dans son billet d’opposition au bilinguisme officielle de la Ville d’Ottawa, que nous avons affiché sur notre site Web malgré sa virulence, et qui est un bel exemple de ce que vous déplorez. Je me suis abonnée à votre blogue et je vais pouvoir vous suivre plus facilement dorénavant. Merci de commenter sur les sujets de l’heure qui portent sur les francophones et la francophonie, vous êtes un bel exemple à suivre.
RépondreSupprimerMichelle de Courville Nicol, Ottawa