jeudi 28 avril 2016
OUI Québec en terre de mission… à Gatineau...
Hier en début de soirée (mercredi 27 avril), je jasais avec le mathématicien Charles Castonguay à l'assemblée des «OUI Québec», dans le café-bar de l'Université du Québec en Outaouais (UQO), à Gatineau. Nous discutions devant la fenêtre panoramique surplombant la rivière des Outaouais, un peu à l'ouest des chutes Chaudière, avec vue de l'immense complexe fédéral du Pré Tunney, sur l'autre rive, à Ottawa.
Je lui indiquais que nous nous trouvions en face de mon quartier natal, le secteur Saint-François d'Assise à Ottawa, ancien «village» francophone dans la capitale canadienne. Charles Castonguay, pour sa part, pointait vers les chutes pour marquer la direction de son milieu d'enfance, le quartier Saint-Jean-Baptiste d'Ottawa, aujourd'hui presque vidé de sa population canadienne-française (quoique Charles ait grandi dans une famille anglophone, s'étant francisé par la suite).
Deux ex-Ontariens dans une assemblée d'indépendantistes. Cela peut sembler étrange, sauf si l'on est originaire de ce coin de pays. J'y ai aussi rencontré Richard Nadeau, ancien député bloquiste de Gatineau (2006-2011) aux Communes, né à... Hawkesbury, Ontario. Si on me disait que Gatineau comptait des dizaines de milliers d'ex-Franco-Ontariens, je ne serais nullement surpris…
En 1977, quand l'Association de la jeunesse franco-ontarienne (AJFO) avait organisé des retrouvailles de son ancien «cercle» de Saint-François d'Assise, la moitié des 80 participants avaient donné une adresse québécoise… Dans la dizaine d'années précédente, alors que les quartiers franco-ontariens d'Ottawa se désintégraient à vue d'oeil, des tas de francophones de la capitale avaient traversé la rivière.
Les années 60… les années 70… Des décennies de contestation, avec une lutte intensifiée pour les droits de la langue française, et pour le droit à l'autodétermination du Québec. L'étrange chimie d'une capitale fédérale trop souvent anti-francophone et la présence de noyaux canadiens-français nationalistes des deux côtés de la rivière a créé au confluent des rivières Rideau, Gatineau et Outaouais un terreau fertile pour le militantisme.
Les racines du Rassemblement pour l'indépendance nationale (RIN) s'enfoncent ici, depuis les sorties de Marcel Chaput à l'aube de la Révolution tranquille. Et des recherches démontreraient qu'au RIN, puis par la suite au Parti québécois, des Franco-Ontariens se sont associés dès le début à leurs compatriotes de l'Outaouais québécois. Mais c'était il y a un demi-siècle, ou presque, ou plus, et à voir l'âge moyen des personnes présentes hier soir à la rencontre des «OUI Québec», j'ai eu l'impression que cette vieille génération nationaliste était sur-représentée…
Oh il y avait bien quelques têtes à l'allure estudiantine, et un certain nombre de jeunes adultes, dont Geneviève Gendron-Nadeau, présidente de la table régionale outaouaise des OUI Québec, mais j'aurais pu imaginer la majorité des participants d'hier soir à une assemblée similaire des années 70 ou 80… Claudette Carbonneau, présidente des OUI Québec, a fait valoir qu'à l'heure de la réunion (17 h) les retraités étaient plus disponibles que les jeunes travailleurs (et c'est vrai) mais nous étions rassemblés dans le café-bar de l'UQO où circulent tous les jours des milliers d'étudiants… Ils ne sont pas venus…
Avec une participation d'entre 50 et 70 personnes à l'heure de pointe sur l'une des artères les plus congestionnées de la ville de Gatineau, j'opinerais que c'était plutôt réussi. Et il y avait là des gens de toutes les formations visées dans l'effort de convergence indépendantiste (PQ, ON et QS, entre autres). Tous, toutes semblaient animés d'un esprit de collaboration en dépit de priorités différentes, et tous, toutes, apparaissaient conscients de la gravité des échéances électorales de 2018. Mais le groupe avait le défaut de ses qualités: des convaincus prêchant à des convaincus…
Si, comme l'indiquaient mercredi soir les dirigeants de OUI Québec, Claudette Carbonneau (ancienne présidente de la CSN) et Pierre Curzi (du NMQ), l'objectif est de «monter un solide mouvement citoyen» et de faire pression sur les hiérarchies des partis et gouvernements avec une volonté citoyenne émanant de la base, c'était moins réussi. Les discours enflammés entre militants sont réconfortants mais ne convainquent personne sur la place publique…
J'aurais aimé entendre M. Curzi ou n'importe lequel des participants (y compris moi, j'imagine) s'adresser aux foules massées aux arrêts du Rapibus de Gatineau ou déambulant dans les couloirs des centres commerciaux… L'écart de langage et de culture aurait été tellement énorme qu'ils auraient eu l'impression - presque - de s'adresser à des étrangers. Et pourtant ils sont des nôtres, pourront voter en 2018 et iront probablement appuyer le NON à 75% au prochain référendum s'il y en a un…
Quand bien même les grandes formations politiques indépendantistes s'entendraient comme larrons en foire, et chanteraient «Nous vaincrons» à l'unisson sans fausse note, le problème ici est bien plus fondamental. La langue française, ciment de la nation, est en danger. À Ottawa, en face, la situation risque de devenir critique, et à Gatineau, une anglicisation sournoise fait son bonhomme de chemin dans l'indifférence générale et le silence des élus… Avant même d'essayer de convaincre l'Outaouais urbain d'appuyer un éventuel «OUI», il faudra commencer par lutter pour assurer la pérennité de la langue et de la culture françaises…
Mon épouse ayant besoin de la voiture, je me suis rendu hier à l'assemblée des OUI Québec par autobus, un assez long trajet de près d'une heure… À côté de moi en allant, un couple étudiant se bécotait, discutant entre les mots d'amour des plans pour la fin de semaine et des travaux scolaires à remettre… Tout autour de moi, des gens largement silencieux, collés à leurs petits écrans, certains avec des écouteurs… Un autre voisin, parlant à voix basse au cellulaire, une phrase en français, l'autre en anglais… Au retour, dans un autobus presque vide, une conversation à voix haute entre le chauffeur et un étudiant en ébénisterie, qui se vantait que ses plans de meubles étaient toujours «accurate»… Pas précis, «accurate»… Il l'a répété au moins 10 fois…
Je me demande comment Claudette Carbonneau ou Pierre Curzi auraient abordé ces gens… Bonjour, j'aimerais vous parler de l'indépendance du Québec… Non, pas vraiment… Et pourtant n'est-ce pas là le défi à relever, avant qu'il ne soit trop tard? Bon an mal an, il reste en Outaouais un quart de la population prêt à voter pour les partis souverainistes… Ils se manifestent dans l'isoloir aux quatre ans, mais à l'exception d'une infime minorité militante, ne chuchoteront leurs convictions qu'à ceux et celles qui les partagent, conscients de l'hostilité, voire de la haine orchestrée et entretenue par ici contre ceux et celles qui voudraient bousculer la vieille Confédération bien trop confortable…
Gatineau a beau être la quatrième ville en importance au Québec, et à 80% francophone (pour le moment), il ne faut jamais oublier que la capitale fédérale, Ottawa, à 85% anglophone et avec une population trois fois plus élevée (900 000 personnes), domine le paysage économique et culturel. Il y a cinq ponts entre les deux villes, et des dizaines (des centaines?) de milliers de personnes font la navette d'une rive à l'autre. Il est plus facile d'être indépendantiste à Chicoutimi qu'à Gatineau. J'y pensais en regardant la rive ontarienne dans le café-bar de l'UQO, mercredi soir…
Je n'ai pas de solution… Devra-t-on, comme cela se fait dans d'autres régions, reprendre le bon vieux porte-à-porte pour rejoindre le public? Je ne sais pas… On ne peut guère compter sur les grands médias. Aucun n'aidera la cause de l'indépendance du Québec. Et pourtant il y a urgence… Si la participation d'hier soir est une indication fiable, plus de la moitié des forces vives du souverainisme seront mortes et enterrées d'ici 20 ou 30 ans (dans vingt ans, si je survis, j'aurai 90 ans…).
J'aurais bien aimé voir notre fleurdelisé flotter à l'ONU avant qu'on inscrive une date de décès sur ma pierre tombale… Hier soir, j'ai trouvé l'assemblée plaisante, et rencontré des gens bien engagés. Mais je n'ai pas vu de lumière au bout du tunnel. Alors si quelqu'un a de bonnes idées, c'est l'temps!
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Il y a tellement chats à fouetter en même temps qu'on y perds son latin.Sa langue on mélange langue française culturelle et langue de travail et
RépondreSupprimerPour votre réflexion!Dans mon entourage dans la métropole, c'est ce que je vois.
RépondreSupprimerLes jeunes québécois disent: “Canada, adieu !”
http://www2.lactualite.com/jean-francois-lisee/jeunes-quebecois-canada-adieu/7168/
Chez les 18-24 ans, cette auto identification québécoise atteint: 68%. Pour le reste, 13% se disent également Canadiens et Québécois et seulement 14% se disent “Canadiens d’abord” ou “Canadiens seulement”.
Chez les francophones de 18-24 ans, le niveau est de 77%. (13% égal et 8,4% Canadiens)
(l’Association des études canadiennes, dont le directeur est Jack Jedwab)
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RépondreSupprimerAvis à l'auteur du commentaire supprimé. On n'utilisera pas mon blogue pour prêter de l'argent ou vendre des bebelles. Allez ailleurs!!!
RépondreSupprimerBonjour mesdames et messieurs,
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