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LA LOI 22, VUE PAR CERTAINS MÉDIAS ANGLOPHONES
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La façon dont on a reçu le projet de loi 22 au Canada anglais est très certainement due, tout au moins en partie, à la présentation erronée qu'en ont fait certains, sinon la plupart des médias d'information anglophones, dont l'Ottawa Citizen et l'Ottawa Journal.
À lire quelques-uns de ces journaux, à écouter certaines stations de radio anglophones de la capitale, on aurait cru que le bill 22 allait faire du Québec un ghetto unilingue français et que la seule opposition raisonnable au projet de loi Cloutier venait des groupes de langue anglaise ou bilingues qui favorisaient le statu quo.
Cette conception a été de nouveau mise en évidence, la semaine dernière, lors des discussions sur le regroupement municipal à l'ouest de la rivière Gatineau*. À croire le Citizen, on en conclut que "English in out"... et que Lucerne et Aylmer, regroupées avec Hull, deviennent unilingues françaises.
Une lecture rapide de la Loi 22 aurait pourtant permis d'écarter facilement cette thèse farfelue. L'article 10 dit : « Toute personne a le droit de s'adresser à l'administration publique en français ou en anglais, à son choix. » Or, l'administration publique, c'est aussi les municipalités. Elles sont donc tenues, par cet article, de fournir des services en français et en anglais.
L'article 15 de la Loi précise : « En assemblée délibérante dans l'administration publique, les interventions dans les débats officiels peuvent être faites en langue française ou en langue anglaise, au choix de ceux qui interviennent. » Est-ce assez clair? Les conseillers anglophones, s'il y en a au sein de la municipalité regroupée, seront libres de s'exprimer en anglais.
La langue de communication interne de la super-ville de Hull*, c'est-à-dire la la langue utilisée par ses employés au travail, sera évidemment le français. Ce n'est que normal. Mais de là à « charrier » comme l'ont fait certains journaux et hommes politiques (particulièrement de Lucerne et d'Aylmer) en prétendant que l'anglais était éliminé, il y a toute une marge...
Peu d'anglophones semblent avoir lu la Loi 22 d'un bout à l'autre. Ils ont, pour la plupart, interprété cette loi à la lumière des nouvelles et éditoriaux de la presse anglaise. Ce qu'on leur a dit, à peu près sans nuances, c'est que la Loi 22 érige des murs autour du Québec (Citizen, 1er août), qu'elle traduit une poussée vers l'unilinguisme français (Citizen, juillet) et que ceux qui pensent que la Loi ne protège pas suffisamment les droits du français sont des « super nationalistes et des séparatistes » (Journal, 2 août).
Ces prises de position démontrent d'abord une très mauvaise lecture de la Loi 22 et, ce qui est plus grave, une incompréhension à peu près totale de la situation du français au Québec. À croire plusieurs anglophones, c'est l'anglais qui est menacé au Québec. Qu'est-ce qu'il faut leur dire pour leur prouver le contraire? Que c'est la langue et la culture françaises qui sont en danger, et ce particulièrement dans l'Outaouais. Et que la Loi 22, quoiqu'ils en disent, est une loi faible qui ne change pas grand chose au statut privilégié qu'a toujours eu la minorité anglaise au Québec.
Tout au cours du débat sur le projet de loi, les anglophones ont parlé des francophones comme « partenaires égaux ». Ils ont parlé d'unité, de conciliation, de droits des minorités, de bilinguisme. De beaux principes dont ils se souviennent bien tard, trop tard pour sauver la plupart des minorités francophones à l'extérieur du Québec, maintenant largement assimilées à coup de lois vraiment répressives.
Les anglophones du Québec, eux, sont encore très majoritairement anglais et je me demande parfois si tous ces beaux discours, ce n'est pas tout simplement pour leur permettre de le demeurer...
Pierre Allard
* Ce regroupement n'a pas eu lieu tel que proposé, et il a fallu attendre 2002 pour le super regroupement qui créa la ville actuelle de Gatineau.
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