Les gens d'ailleurs vont regarder la carte et constater que la localité de Quyon est située au Québec, à quelques dizaines de kilomètres à l'ouest de la grande ville de Gatineau. Bon voilà, dira-t-on, la question est réglée, cela doit donc se passer en français, sans discussion, même à l'intérieur de l'Église catholique… Eh bien non, ce n'est pas si simple que cela, et le résultat, c'est que les Québécois francophones y sont traités comme les Franco-Ontariens l'ont été pendant trop longtemps et que les taux d'anglicisation au Pontiac, y compris dans la région de Quyon, sont parfois dramatiques.
D'abord, précisons que sur le plan municipal, la localité de Quyon fait partie de la municipalité de Pontiac, laquelle n'est pas véritablement incluse dans la région du Pontiac comme telle. Elle est plutôt intégrée à une grappe de municipalités qui ceinturent la ville de Gatineau sous l'appellation «MRC des Collines-de-l'Outaouais». Sur le plan religieux, toutefois, la partie est de la municipalité de Pontiac (secteur Eardley-Luskville) relève de l'archidiocèse de Gatineau, alors que la partie ouest (y compris le secteur Quyon) est soumise au diocèse ontarien de Pembroke.
Les francophones du Pontiac souffrent sous l'autorité du diocèse de Pembroke le 19e siècle et personne, y compris l'actuel archevêque de Gatineau, Mgr Durocher, ne semble avoir l'intention de leur porter secours. Lisez le livre de Luc Bouvier, Les sacrifiés de la bonne entente, et vous saurez à quoi vous en tenir quant au comportement anti-francophone historique de nombreux Anglo-Catholiques du Pontiac et de la région de Pembroke. Après plus d'un siècle de persécutions et de négligence, une forte proportion des Pontissois francophones sont brisés, n'ont plus de volonté de résistance, et les rares qui lèvent la tête pour s'affirmer sont identifiés comme des trouble-fête…
Et voilà que tout à coup, des parents de Quyon voudraient bien que leur enfant fasse sa première communion en français… Une demande tout à fait légitime… Or, la paroisse St. Mary's de Quyon, d'après le site Web du diocèse de Pembroke, est une paroisse de langue anglaise. Si c'était le contraire, un anglophone qui demandait la première communion dans sa langue dans une paroisse francophone, que dirions-nous? Certains diraient oui, d'autres non… mais la réponse ne serait pas automatique. J'ai tendance à croire que nous serions plus accommodants que les anglos du Pontiac et de l'Ottawa Valley… Mais la question se pose.
Alors, acceptons pour un instant (ce qui n'est vraiment pas le cas) que les anglophones de Quyon se sentent menacés et que, pour protéger leur langue et leur culture, ils veuillent conserver une petite oasis anglaise autour du clocher paroissial. Les francophones de Quyon devront alors aller à la paroisse francophone la plus rapprochée ou s'en fonder une (la dernière option est irréaliste). Mais la paroisse de langue française la plus proche est celle de Luskville (paroisse Saint-Dominique), dans la même municipalité mais dans un tout autre diocèse… celui de Gatineau. Cela cause-t-il des problèmes? Si oui, il faudra aller aux paroisses plutôt éloignées du Lac-des-Loups ou de Bryson…
J'aurais voulu inclure des données sur la situation des francophones dans le secteur Quyon, pour démontrer leur précarité mais les tableaux du recensement fédéral ne font pas de distinction entre les secteurs plus francophones et plus anglophones de la municipalité de Pontiac. Selon la langue maternelle, cette ville de 5635 habitants est à 56% francophone, mais seulement à 52% francophone selon le critère de la langue d'usage (langue utilisée le plus souvent à la maison). Il y a un taux réel d'assimilation des francophones, sans doute concentré dans le secteur de Quyon, qui avoisine les localités les plus férocement anglophones du Pontiac.
Alors bonne chance à M. Bossé et Mme Duval de Quyon, ainsi qu'à Impératif français. Vous venez de vous buter à un problème que personne ne semble avoir pu résoudre depuis les années 1800… comment se sentir chez soi comme francophone dans le Pontiac québécois. Vous devrez lutter contre un diocèse (Pembroke) qui a historiquement persécuté ses fidèles francophones. Vous devrez lutter contre l'indifférence des autorités de l'archidiocèse de Gatineau, qui continuent de fermer les yeux sur l'injustice parce que la majorité des francophones du Pontiac, battus jusqu'à soumission docile, ne protestent plus. Vous devrez lutter contre une opinion publique et des médias qui ignorent tout de votre situation. Et vous ne pouvez espérer l'appui d'un gouvernement très provincial qui fait tout sauf promouvoir le français (y compris votre député qui a prêté serment en anglais comme en français)…
Je vous dirais «bonne chance» mais ici «merde!» est tout indiqué. Avec le diocèse de Pembroke, si le passé est garant du présent et de l'avenir, vous avez les deux pieds dedans…
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Quelques renseignements additionnels trouvés après rédaction du blogue.
Selon le site Web de la municipalité de Pontiac, l'église de Quyon portait jadis le nom Sainte-Marie-de-Quyon, en français. Elle a été incendiée par des Orangistes fanatiques et 1854 et rebâtie l'année suivante. Dans un rapport sur la situation linguistique des paroisses du diocèse de Pontiac, rédigé en 1957, un siècle plus tard, on écrit: «…sous la direction de Father Wingle (le prêtre local), il n'y a jamais un mot de français et il n'y en a jamais eu…» à l'église Sainte-Marie, à Quyon. Selon Luc Bouvier, en 1961, 53% des catholiques de la paroisse de Quyon étaient d'origine française.
J'ai aussi découvert qu'Impératif français avait volontairement omis le diocèse de Pembroke de son envoi, refusant de reconnaître sa légitimité comme autorité diocésaine sur une région québécoise. Avoir su dès le départ, j'aurais omis le mot «maladroitement» au début de mon texte de blogue et aurais plutôt commenté cette stratégie, qui se défend bien.
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Quelques renseignements additionnels trouvés après rédaction du blogue.
Selon le site Web de la municipalité de Pontiac, l'église de Quyon portait jadis le nom Sainte-Marie-de-Quyon, en français. Elle a été incendiée par des Orangistes fanatiques et 1854 et rebâtie l'année suivante. Dans un rapport sur la situation linguistique des paroisses du diocèse de Pontiac, rédigé en 1957, un siècle plus tard, on écrit: «…sous la direction de Father Wingle (le prêtre local), il n'y a jamais un mot de français et il n'y en a jamais eu…» à l'église Sainte-Marie, à Quyon. Selon Luc Bouvier, en 1961, 53% des catholiques de la paroisse de Quyon étaient d'origine française.
J'ai aussi découvert qu'Impératif français avait volontairement omis le diocèse de Pembroke de son envoi, refusant de reconnaître sa légitimité comme autorité diocésaine sur une région québécoise. Avoir su dès le départ, j'aurais omis le mot «maladroitement» au début de mon texte de blogue et aurais plutôt commenté cette stratégie, qui se défend bien.
Liens à d'autres textes sur le Pontiac et l'Église catholique:
L'archidiocèse incomplet. http://bit.ly/15RWQSh
Francophones du Pontiac: l'Archidiocèse de Gatineau doit assumer ses responsabilités. http://bit.ly/14Hk4rt
La longue agonie des francophones du Pontiac. http://bit.ly/TNLLYD
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